Cette synthèse du rapport original Measuring Risk in Agent Networks décrit les différents types de risques inhérents aux réseaux d’agents utilisés par les fournisseurs de services financiers digitaux pour la distribution de leurs services. Il s’appuie sur les données quantitatives et qualitatives recueillies lors des deux séries d’enquêtes réalisées dans le cadre du programme ANA (Accélérateur de réseaux d’agents) dans neuf pays, complétées par les données issues des études menées par Financial Inclusion Insights (FII). Sur la base de l’observation des activités des réseaux d’agents dans ces pays, nous proposons un ensemble d’indicateurs pour mesurer ces risques et présentons les résultats des comparaisons nationales.
Kevin Genga, Wanjiku Kiarie et Vera Bersudskaya, 2018
Cette synthèse du rapport original Measuring Risk in Agent Networks décrit les différents types de risques inhérents aux réseaux d’agents utilisés par les fournisseurs de services financiers digitaux pour la distribution de leurs services. Il s’appuie sur les données quantitatives et qualitatives recueillies lors des deux séries d’enquêtes réalisées dans le cadre du programme ANA (Accélérateur de réseaux d’agents) dans neuf pays, complétées par les données issues des études menées par Financial Inclusion Insights (FII). Sur la base de l’observation des activités des réseaux d’agents dans ces pays, nous proposons un ensemble d’indicateurs pour mesurer ces risques et présentons les résultats des comparaisons nationales.
Le risque s’entend comme la possibilité d’une perte ou d’une incapacité à atteindre les objectifs fixés en raison d’événements internes ou externes. Pour mesurer le risque, les fournisseurs de services financiers digitaux doivent mettre en place un plan de suivi et de support efficace sur la base des indicateurs de risque présentés dans ce rapport.
Le risque réglementaire renvoie à l’impact potentiel d’un changement de réglementation ou de législation sur le secteur des services financiers digitaux ou l’activité d’agent, s’il conduit à modifier les processus clés ou à faire varier la structure des coûts notamment. Les fournisseurs de services financiers digitaux sont par ailleurs tenus de s’assurer que leurs agents se conforment à l’ensemble des réglementations applicables, notamment en matière de divulgation, de connaissance de la clientèle (KYC), de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme et de protection des consommateurs.
Les indicateurs utilisés pour contrôler ou évaluer les risques réglementaires dans les études ANA et FII sont les suivants :
Dans tous les pays, excepté l’Indonésie, la majorité des agents affichent leur grille tarifaire. En dehors du Bangladesh et de l’Indonésie, la plupart des pays ont une législation qui impose aux agents de le faire, mais le respect de cette règle reste très inégal.
Dans les pays où la réglementation prescrit l’affichage du numéro d’identification de l’agent (Tanzanie et Kenya), le taux de conformité est supérieur à 85 %. Dans les autres pays, 13 à 55 % des agents affichent leur numéro. Sur les marchés dominés par les transactions assistées par agent (OTC), l’affichage du numéro d’identification, qui intègre dans la majorité des cas le numéro de téléphone mobile de l’agent, est problématique dans la mesure où il favorise les fraudes.
En ce qui concerne les transactions assistées par agent, elles sont autorisées au Bangladesh et au Pakistan. En Afrique de l’Est, la législation interdit les transactions réalisées avec le téléphone d’un agent pour protéger les consommateurs ; mais les enquêtes montrent qu’en Ouganda une proportion significative de clients (17 %) obtiennent toujours ce service.
Le risque technologique peut naître de partenariats mal conçus entre les fournisseurs de services financiers et les sociétés technologiques, en particulier en l’absence de définition claire des attentes en matière de niveau de service. Les risques technologiques mettent en péril les actifs et les processus essentiels au succès de l’activité d’agent.
Les principaux indicateurs permettant de contrôler et d’évaluer le risque technologique sont les suivants :
Bien que les données divergent selon les pays, les études montrent clairement que la plupart des agents sont toujours confrontés au manque de fiabilité du service, qui est susceptible de freiner l’utilisation. Plus préoccupant encore est le manque d’information préalable en cas d’interruption de service imminente.
Les risques opérationnels découlent de l’inadéquation ou de l’échec de processus, d’intervenants ou de systèmes internes, ou d’événements externes, et ont des conséquences graves à la fois pour les fournisseurs de services et les consommateurs. Failles technologiques, erreurs humaines et malversations sont les trois principaux types de risques susceptibles d’occasionner des pertes estimées entre 1 et 3 USD par an et par consommateur.
Les principaux indicateurs permettant de contrôler et d’évaluer les risques opérationnels sont les suivants :
La formation des agents et les visites de support sont des moyens importants pour atténuer les risques opérationnels au sein du réseau, dans la mesure où elles permettent de s’assurer que les agents savent comment faire fonctionner leur activité, connaissent les règles et réglementations à appliquer et se conforment aux normes et instructions du fournisseur. Si les taux de formation initiale sont généralement plus élevés en Afrique de l’Est, cette région compte tout de même 8 à 20 % d’agents non formés.
De même, de nombreux agents ne reçoivent pas la visite de personnel de support dans leurs points de service après leur installation. En Ouganda, 51 % des agents n’avaient jamais reçu de visite d’appui lors de la première enquête ANA.
Les pays d’Afrique se caractérisent par une forte proportion d’employés ou d’opérateurs de caisse dans les points de service, alors qu’en Asie les services sont en majorité opérés par les propriétaires de l’entreprise d’agent. La forte rotation du personnel est une préoccupation majeure et l’emploi de personnel induit un risque qui requiert des mesures de prévention.
À l’exception du Sénégal, le taux d’agents n’ayant pas terminé leurs études secondaires est inférieur à 30 % dans les pays étudiés. Si le niveau d’éducation en lui-même n’est pas un indicateur de la réussite d’un agent, les études montrent clairement que les agents ayant une bonne connaissance des règles et des produits affichent de meilleures performances.
Le risque de fraude est souvent traité séparément dans les cadres de gestion du risque en raison de la sensibilité des consommateurs à la fraude et de son coût pour l’entreprise. La fraude peut cibler les agents, les clients et les fournisseurs et peut être le fait de salariés, de fraudeurs externes ou d’agents malhonnêtes.
Les principaux indicateurs permettant de contrôler et d’évaluer les risques de fraude sont les suivants :
Même sur les marchés naissants, les agents sont victimes de fraude et de vol, la fraude étant la plus fréquente. Globalement ces risques semblent plus importants sur les marchés africains, l’Ouganda étant le plus touché par la fraude à tous les niveaux. Loin de s’améliorer dans le temps, la fraude évolue avec la maturation du marché, les agents les plus performants (effectuant plus de 40 transactions par jour) et ceux qui sont en activité depuis plus de trois ans étant les plus touchés par la fraude. Lors de la deuxième vague d’enquêtes, seul le Kenya avait réduit l’incidence de la fraude, grâce à une meilleure sensibilisation à la gestion des risques et à la mise en place de mécanismes de prévention de la fraude.
Le risque de liquidité, également appelé risque de solvabilité, intervient lorsque le manque de trésorerie (trésorerie électronique ou espèces) amoindrit la capacité de transaction et de génération de revenus de l’agent. Il est particulièrement préjudiciable lorsqu’il empêche les clients d’accéder à leurs fonds au moment où ils le souhaitent.
Les principaux indicateurs permettant de contrôler et d’évaluer les risques de liquidité sont les suivants :
Les études montrent qu’en Afrique de l’Est plus de quatre clients sur dix se sont vus refuser des transactions en raison du manque de liquidité des agents. L’insuffisance de trésorerie peut s’expliquer par les limitations applicables à la livraison de liquidités ou par le fait que dans cette région de nombreux agents sont non exclusifs et doivent gérer autant de caisses que de fournisseurs servis.
Le risque de réputation renvoie à la perte potentielle du capital de réputation de l’entreprise, l’un de ses actifs les plus précieux. Les partenariats établis dans le cadre d’un accord de services financiers digitaux induisent toujours un risque de réputation en raison du contrôle limité des fournisseurs sur la fiabilité et la qualité de service de leurs partenaires.
Les principaux indicateurs permettant de contrôler et d’évaluer les risques de réputation sont les suivants :
En Afrique, la proportion de points de service affichant l’enseigne ou les couleurs du fournisseur est de 88 à 98 % (contre 83 % au Bangladesh et 77 % au Pakistan).
L’Ouganda est particulièrement concerné par la facturation de frais supplémentaires par les agents réalisant les transactions, une pratique courante à la fois en zone urbaine et rurale.
À l’exception notable du Pakistan, la majorité des clients déclarent être satisfaits des procédures de résolution des plaintes liées aux agents.
Les risques financiers renvoient aux incertitudes relatives à la viabilité des activités de l’agence, notamment en cas de proposition de valeur insuffisante pour l’agent et/ou le client.
Les principaux indicateurs permettant de contrôler et d’évaluer les risques financiers sont les suivants :
De nombreux fournisseurs ont du mal à ajuster correctement la taille du réseau d’agents au volume de la clientèle, ce qui se traduit dans le nombre très variable de transactions quotidiennes moyennes effectuées par les agents (7 à 45).
Les agents opérant une activité de services financiers digitaux à perte ont toutes les chances de devenir inactifs, et donc de gaspiller les ressources des fournisseurs consacrées à leur recrutement, à leur formation et à leur support. Les fournisseurs peuvent surveiller les agents peu performants et, selon les facteurs en cause, peuvent soit stimuler leur activité, soit cesser complètement de les employer.
Il est conseillé aux fournisseurs d’envisager d’inciter les agents à former les clients aux produits de services financiers digitaux pour favoriser leur adoption.
Recommandations aux intervenants du secteur des services financiers digitaux
L’adéquation, la fiabilité et la pérennité des réseaux d’agents sont essentiels au succès des services financiers digitaux. Pour réduire les risques associés à ces réseaux, les fournisseurs et les agents principaux doivent adopter une approche proactive de formation et de support aux agents. Les fournisseurs peuvent avoir intérêt à externaliser ces services de formation et de suivi des agents, ou à utiliser des plateformes sophistiquées permettant un suivi étroit des points de service et du comportement des agents.
Les fournisseurs et les agents principaux doivent assurer le suivi continu des indicateurs issus des études du programme ANA et présentés dans ce rapport. Certains peuvent être suivis par le biais de visites aux points de service, d’autres par le biais d’enquêtes, d’autres encore par le biais de systèmes dédiés. Dans tous les cas, fournir des services financiers fiables et de qualité est essentiel pour susciter la confiance et assurer la continuité de l’utilisation.
Synthèse du rapport original Measuring Risk in Agent Networks. Les statistiques nationales sont à retrouver dans le rapport complet.
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