Au milieu de tout le regain de discussions sur l’innovation de produits et l’approche de l’inclusion financière axée sur le client et le marché, l’auteur fait valoir que nous avons oublié d’importants aspects des innovations de produits.
Au milieu de tout le regain de discussions sur l’innovation de produits et l’approche de l’inclusion financière axée sur le client et le marché, l’auteur fait valoir que nous avons oublié d’importants aspects des innovations de produits.
Au milieu de tout le regain de discussions sur l’innovation de produits et l’approche d’une inclusion financière axée sur le client (ou ce que nous, à MicroSave Consulting (MSC), appelons depuis plus de 10 ans maintenant une approche « axée sur le marché »), je me demande si nous n’avons pas perdu de vue deux aspects clés :
Meneurs c. suiveurs
Les entreprises (y compris les institutions financières) sont, par stratégie, soit des meneurs, soit des suiveurs, c’est-à-dire des pionniers ou des continuateurs. La préoccupation des pionniers concerne la création de produits afin de se positionner comme leaders sur le marché. Ils investissent énormément dans l’élaboration de produits et disposent souvent d’une capacité interne exceptionnelle pour effectuer des études de marché et créer/tester des produits novateurs ou (comme nous le verrons plus loin) des moyens de commercialisation et de communication concernant les produits existants.
Les suiveurs observent et copient. Ils ont parfois des difficultés avec les systèmes d’appui (informatique, processus, etc.), mais les « apparences » des nouveaux produits sont nettes dès qu’ils sont proposés sur le marché (même, parfois, au stade pilote). Les suiveurs évaluent les chances de succès du produit innové et réagissent en conséquence. Evidemment, s’ils ne voient pas très tôt le potentiel d’un produit, ils peuvent avoir du mal à bouleverser la position ferme qu’occupent les pionniers sur le marché, comme nous l’avons vu par exemple au Kenya avec M-PESA.
En matière d’innovation de produits les stratégies des entreprises peuvent varier selon les régions et en fonction de leur position sur le marché et des ressources qu’elles sont disposées à investir sur un marché donné. Il est donc possible qu’une banque soit un leader sur un marché et fasse du suivisme sur un autre où il y a des opérateurs relativement nouveaux, ou même qu’elle soit en train de recopier ses propres produits d’un pays à l’autre. Ainsi, Equity Bank a largement transposé ses produits phares du Kenya sur les marchés tanzanien, ougandais et rwandais. Une fois bien établie sur ces marchés, on peut raisonnablement s’attendre à ce que la banque utilise ses capacités pour perfectionner ses produits existants ou en élaborer de nouveaux spécifiquement pour ces nouveaux marchés. Une chose est sûre c’est que le leadership sur le marché et la focalisation sur le client sont profondément enracinés dans l’ADN d’Equity Bank (deeply engrained in Equity Bank’s DNA).
Une idée clé à retenir : il est absolument aberrant de s’attendre à ce que toutes les organisations occupent une place de leadership sur le marché et qu’elles fassent de l’innovation en matière de produits… en effet un grand nombre d’entre elles se sont déjà préparées pour n’être rien d’autre que des suiveurs.
Le continuum de l’élaboration de produits
MSC a déjà publié, dans le contexte des institutions de microfinance (à prendre au sens large, c’est-à-dire les banques, les IMF, les coopératives de crédit, etc.) un certain nombre de questions clés à se poser avant le démarrage de tout processus d’élaboration de nouveaux produits (Key Questions that Should Precede New Product Development). Ces mêmes questions sont valables pour les opérateurs de réseau mobile (ORM) et contiennent en leur cœur la question du continuum de l’élaboration de produits.
De nombreux produits sont peu utilisés parce qu’ils ne font pas l’objet d’un marketing et d’une communication adéquats ou appropriés. Partout dans le monde, des millions de clients potentiels n’utilisent pas certains produits financiers parce qu’ils ne sont pas au courant qu’ils existent ou ne comprennent pas suffisamment en quoi ils pourraient leur être utiles. Une étude de marché de bonne qualité peut faire la lumière sur cette question, ainsi que sur de nombreux autres problèmes importants qui conditionnent l’adoption de produits ; {voir notre produit : L’étude de marché : au-delà de l’élaboration de produits (Market Research: Beyond Product Development)}. Ces informations peuvent permettre aux institutions financières d’accroître leur présence sur les segments de marché existants ou de conquérir de nouveaux avec le même produit. Et évidemment, il est beaucoup plus facile, plus rapide et moins coûteux de repositionner un produit grâce à une nouvelle campagne de marketing que d’élaborer un nouveau.
Une étude de marché de bonne qualité peut également révéler des informations importantes sur les modifications mineures à apporter au processus de livraison ou aux modalités générales du produit. Lorsque MSC a commencé à travailler en 2001 avec Equity Bank (alors appelée Equity Building Society) sur l’innovation de produits, elle comptait 109 000 clients. Les premières séries de discussions de groupe ont vite révélé l’importante information que les clients ne comprenaient vraiment pas la raison des charges pléthoriques prélevées par la banque. En quelques jours, Equity a consolidé ces charges en une seule et a déployé une stratégie de communication soutenue visant à informer l’ensemble du marché des changements. C’est ainsi qu’a commencé un cheminement qui a conduit Equity Building Society à se transformer en une banque cotée à la bourse de Nairobi et à devenir la banque dominante au Kenya, desservant fin 2014 8,7 millions de clients (voir la Révolution axée sur le marché de l’Equity Bank) (The Market Led Revolution of Equity Bank). La première étape était le perfectionnement du produit – réalisé pratiquement sans tracasserie et sans même un test pilote.
La dernière étape du continuum de l’élaboration qui est la plus complexe et a consommé le plus de temps et de ressources est celle de l’élaboration de nouveaux produits qui n’est pas une mince affaire. Et comme nous l’avons expliqué dans l’article Qui est l’utilisateur dans la « conception centrée sur l’utilisateur » ? (Who Is The User In “User-Centred Design”?), ce n’est pas non plus quelque chose qui peut être facilement sous-traité avec des tiers qui ne comprennent pas bien le marché, l’environnement réglementaire ou la culture et les systèmes internes de l’institution financière. L’élaboration de nouveaux produits requiert un processus structuré de gestion de bout en bout du risque inhérent, comme nous l’avons expliqué dans le rapport « l’élaboration systématique de produit » Systematic Product Development. En raison de la complexité du processus, il est souvent plus facile de suivre que d’être un leader.
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