En République démocratique du Congo, la prolifération d’agents de mobile money peu scrupuleux qui vendent des cartes SIM pour agent au noir a un effet négatif sur la qualité des services financiers digitaux offerts dans le pays. MSC a récemment effectué une étude de marché en RDC pour évaluer les tendances clés, les facteurs de succès et les défis rencontrés dans la gestion de l’exploitation des réseaux d’agents. Dans ce blog nous abordons en détail l’une des principales observations de l’étude de marché à savoir la revente au noir de cartes SIM pour agent d’opérateur de réseau mobile.
Par,
Djitaba Patel-Sackho, MSC Consulting
Jenny Frydrych, Consultante indépendante
Nancy Kiarie, MSC Consulting
Mars 2019, blog initialement posté sur le site de ACCION
En République démocratique du Congo, la prolifération d’agents de mobile money peu scrupuleux qui vendent des cartes SIM pour agent au noir a un effet négatif sur la qualité des services financiers digitaux offerts dans le pays.
« Jusqu’à présent, je n’ai pas encore pu obtenir une carte SIM de XXX” (un opérateur de réseau mobile important). La carte SIM pour agent que j’utilise n’est pas la mienne, elle est sous l’identité de la personne qui me l’a vendue » explique Francis Malamu.
Francis est un agent de mobile money de Kongo Central en République démocratique du Congo (RDC). Ses problèmes d’enregistrement ont été découverts lorsque nous identifions le parcours qu’il a emprunté pour devenir un agent. MicroSave Consulting (MSC) a récemment effectué une étude de marché en RDC pour évaluer les tendances clés, les facteurs de succès et les défis rencontrés dans la gestion de l’exploitation des réseaux d’agents. L’étude comprenait 50 entretiens approfondis avec des agents des services financiers digitaux à travers le pays ainsi que d’autres avec des personnels clés des prestataires : Airtel Money, Equity Bank, FINCA RDC, Orange Money, et Vodacash.
Dans ce blog nous abordons en détail l’une des principales observations de l’étude de marché à savoir la revente au noir de cartes SIM pour agent d’opérateur de réseau mobile (ORM).
Il ne s’agit pas là d’un phénomène unique à la RDC. En fait nous l’avons observé de manière générale sur plusieurs marchés pendant les phases initiales de la croissance du secteur des services financiers digitaux. Pour MSC, les prestataires de services financiers digitaux de la RDC doivent régler de toute urgence ce problème pour que le secteur puisse fleurir d’une manière qui soit durable pour les prestataires tout en assurant la prestation de services transformants (innovants) et de haute qualité.
Qu’entend-on par « marché noir » de cartes SIM pour agent ?
Un marché noir de cartes SIM pour agents est créé lorsque le propriétaire original d’une carte SIM pour agent revend sa carte SIM à une partie tierce non enregistrée qui l’utilisera pour offrir des services financiers digitaux. Une carte SIM spéciale est nécessaire pour permettre à toute personne jouant le rôle d’agent pour ORM d’offrir, entre autres services, des transactions de dépôts et de retraits d’espèces et de percevoir des commissions correspondantes.
Nous avons pu déterminer deux raisons principales de l’établissement du marché noir de carte SIM pour agent :
Cela signifie, malheureusement, que de nombreux nouveaux propriétaires de cartes SIM pour agent sont mal préparés. Ils ne disposent pas, entre autres facteurs, du capital nécessaire, ni de compétences, ni de base de clientèle suffisante. Les agents dépendent par ailleurs des revenus de commissions ; sans transactions ils deviennent rapidement inactifs. Des agents inactifs peuvent décider de vendre leurs cartes SIM à d’autres personnes qui ont le désir de devenir des agents, et le marché noir est ainsi perpétué.
« Je connais quelqu’un qui travaille chez un important prestataire, ici à Kolwezi et qui m’a aidé à avoir ma carte SIM. Avant cela j’avais rencontré un agent qui avait promis de me donner une carte SIM pour agent pour 20$. Il semble qu’il m’a escroqué puisque j’attends toujours de recevoir cette carte SIM » -Un agent au Katanga
Pourquoi le marché noir de carte SIM pour agent est-il sujet de préoccupation ?
Les risques liés aux agents, aux prestataires et aux consommateurs. Lorsque les agents commencent leurs opérations sans aucune vérification de la part du prestataire de services financiers digitaux, la qualité des services est affectée, la marque du prestataire de services financiers digitaux est compromise et les clients courent le risque d’être à la merci des agents peu scrupuleux qui ne sont ni enregistrés ni identifiables dans la base de données du prestataire de services financiers digitaux.
Lorsque les agents obtiennent des cartes SIM illégalement, ils ne sont soumis à aucun contrôle CTC/KYC de la part du prestataire de services financiers digitaux, ils n’ont pas de contrats avec lui et ne suivent aucune formation offerte par ce dernier. Ils ne font donc pas l’objet d’un suivi et ne reçoivent aucun appui de la part du prestataire de services financiers digitaux. Les contrôles CTC/KYC sont une pratique essentielle imposée par la Banque centrale de la RDC pour permettre de minimiser l’exposition au risque et à la fraude. Les insuffisances réduisent les profits des agents et des prestataires et ajoutent une multitude de risques à l’activité des services financiers digitaux. Au fur et à mesure que le marché noir des cartes SIM pour agents se développe, le prestataire de services financiers digitaux a de moins en moins une visibilité sur l’identité individuelle de ses agents, ce qui complique sa tâche quant à la garantie de la qualité de l’ensemble du réseau.
Le marché noir est un phénomène à éradiquer.
La question de la viabilité des agents. Un agent qui n’a pas suivi le processus contractuel officiel n’est probablement pas en mesure d’avoir une perspective adéquate de ses responsabilités et de ses obligations. Un agent qui n’a pas reçu une formation officielle aura du mal à servir les clients avec le niveau de qualité élevé requis par les prestataires de services financiers digitaux, portant ainsi préjudice à la réputation de la marque et du service.
Par exemple, sa capacité en matière de gestion de liquidité sera probablement en dessous de l’optimum en raison du manque de formation et d’appui de la part du prestataire. Le manque de liquidité réduit d’autre part la capacité de l’agent à offrir régulièrement des services aux clients et donc diminue les commissions et les revenus potentiels, ce qui résulte probablement en une activité non-viable pour l’agent en question.
Heureusement, certains ORM de la RDC ont commencé à prendre des mesures pour résoudre le problème. Les mesures qui sont utilisées par les prestataires pour éradiquer le « marché noir » des cartes SIM pour agent sont les suivantes :
D’autres mesures utilisées efficacement par des prestataires de services financiers digitaux sur d’autres marchés sont :
Qualité contre quantité des banquiers par agent
Il convient de reconnaître qu’il est difficile de trouver le bon équilibre entre la quantité d’agents sur le terrain et la qualité des agents. Il est cependant important que les prestataires de services financiers digitaux arrivent à le faire afin de minimiser les risques et de maintenir la viabilité des services. Nous pensons que trois mesures majeures permettraient à la fois d’assurer un meilleur équilibre entre la quantité et la qualité des agents sur le terrain et d’éradiquer le marché noir :
Comme le montre clairement notre étude, le marché noir des cartes SIM pour agents en RDC présente d’importants dangers pour les prestataires et risque de freiner la croissance à long terme des services financiers digitaux dans le pays.
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