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La microfinance pour l’eau et l’assainissement : opportunités et défis pour les IMF

  • user by MSC
  • time Jul 11, 2019
  • calendar 6 min

Pourquoi utiliser la microfinance pour le financement de l’accès aux services liés à l’eau portable et abordable, l’assainissement ainsi que l’hygiène ? La recherche révèle un potentiel de marché considérable pour la microfinance dans le domaine de l’eau et de l’assainissement. Reste à savoir dans quelle mesure ce potentiel peut se transformer en une opportunité commerciale durable pour les IMF.

La microfinance pour l’eau et l’assainissement : opportunités et défis pour les IMF

Mai 2018

Contexte : amener les ménages à investir dans le cadre du financement WASH  

L’accès aux services liés à l’eau portable et abordable, l’assainissement ainsi que l’hygiène (WASH) est essentiel pour l’amélioration de la qualité de vie des populations. Pourtant, 2,4 milliards de personnes n’ont pas accès à des installations sanitaires améliorées et 663 millions de gens dans le monde n’ont pas accès à l’eau potable. Par conséquent, l’accès à l’eau potable, à l’assainissement et à l’hygiène est au cœur des objectifs de développement durable des Nations Unies.

Ce programme vise à assurer à toutes les populations d’ici 2030, l’accès universel et équitable à l’eau potable et abordable, ainsi qu’à l’assainissement et à l’hygiène adéquate et équitable. Selon les estimations de la Banque mondiale, il faut 1,7 billion de dollars pour atteindre ces objectifs. Les données suggèrent que les finances publiques ne suffiront pas à elles seules et que des investissements privés ou des approches de financement innovantes sont nécessaires.

Pourquoi utiliser la microfinance pour le financement WASH ?

Les ménages à faible revenu ne peuvent pas accéder à l’infrastructure WASH à un prix abordable. Les recherches menées par MicroSave Consulting (MSC) montrent que dans certaines régions d’Asie, la construction de toilettes privées peut coûter jusqu’à 400 USD par ménage, alors que les raccordements à l’eau courante coûtent environ 150 USD (voir ici et ici). Nos recherches révèlent également que les pauvres ont des priorités plus importantes, comme l’éducation et la santé, qui généralement épuisent leurs liquidités. Les améliorations dans le domaine WASH qui nécessitent un gros investissement sont reléguées au second plan.

Il est intéressant de noter que les produits de crédit offerts par la plupart des institutions de microfinance (IMF) correspondent au « sweet spot » (point idéal) des investissements WASH. De manière générale, les IMF ont des systèmes et des processus bien rodés pour offrir des crédits de l’ordre de 100 à 500 USD, tout en échelonnant les remboursements sur une période de six mois, un an, voire plus.

La recherche révèle un potentiel de marché considérable pour la microfinance dans le domaine de l’eau et de l’assainissement. Reste à savoir dans quelle mesure ce potentiel peut se transformer en une opportunité commerciale durable pour les IMF.

Le financement WASH diffère des prêts productifs de manière significative, en ce sens que ces prêts ne génèrent pas de flux de revenus visibles. La pertinence d’un produit de financement WASH est déterminée par plusieurs facteurs stratégiques et opérationnels, dont notamment :

  • Facteurs écologiques et existence d’infrastructures publiques WASH : Le caractère favorable des facteurs hydrogéologiques clés a une incidence directe sur l’adoption de l’équipement et des services WASH. Il s’agit notamment de l’inclinaison du terrain, de l’épaisseur et de la qualité de la couche arable et de la disponibilité de sources d’eau à proximité. Par exemple, si une IMF accorde un crédit pour la construction de toilettes dans une région souffrant d’une pénurie chronique d’eau, le client retombera tôt ou tard dans l’habitude de défécation en plein air. De même, la disponibilité de l’infrastructure WASH publique, telle que les canalisations d’égouts ou les canalisations principales pour l’eau, facilite l’adoption des services WASH. Les IMF doivent sélectionner les zones géographiques où elles ont le plus de chances de réussir.
  • Connaissance et utilisation actuelles de l’infrastructure WASH existante : Les recherches menées par MSC auprès des clients montrent que la demande pour les installations WASH est plus élevée lorsque l’infrastructure existante est « effectivement utilisée ». Nous avons constaté que la demande de toilettes tend à s’accroitre dans les villages où une population importante utilise des installations sanitaires privées ou communautaires. Les raisons sont faciles à comprendre : plus l’usage augmente, plus l’opinion publique défavorable à la défécation à l’air libre se renforce. Avec le temps, de plus en plus de ménages construisent leurs propres toilettes. Les gens sont donc plus susceptibles d’accéder au financement pour améliorer et acquérir des systèmes WASH dans un environnement favorable.
  • Collaboration avec les fournisseurs de produits ou de services WASH : Dans plusieurs régions géographiques, il existe des fabricants de produits et des fournisseurs de services WASH qui ne sont pas en mesure d’exploiter le segment à faible revenu en raison des coûts initiaux élevés. Les IMF peuvent collaborer avec ces entités et exploiter la demande existante du marché pour ces services. SMEP, une IMF au Kenya, a collaboré avec des fabricants de réservoirs d’eau pour octroyer des prêts pour des structures de stockage d’eau. De même, Bank Syariah Mandiri, une banque commerciale basée en Indonésie, propose des prêts pour le raccordement à l’eau courante assuré par l’agence publique locale d’approvisionnement en eau.
  • Disponibilité d’un financement à long terme pour WASH : Dans de nombreux pays, les IMF dépendent du financement par emprunt offert par des banques et des institutions financières pour financer leur portefeuille, mais ces fonds sont limités aux « activités génératrices de revenus ou productives ». L’inadéquation entre l’actif et le passif est un autre problème. L’échéance d’un prêt WASH est souvent plus longue. Une IMF qui bénéficie d’un prêt à court terme s’expose à un risque de liquidité si elle offre un prêt WASH. Ainsi, les IMF peuvent être amenées à rechercher des sources de fonds plus adaptées, des investisseurs sociaux ou des capitaux à long terme pour mobiliser des fonds pour le financement WASH.
  • Capacités techniques d’évaluation de l’infrastructure WASH : Les IMF doivent posséder des capacités techniques pour comprendre la faisabilité de la mise en place d’une infrastructure WASH nécessaire pour répondre aux différents besoins de WASH. Il s’agit, entre autres, du niveau des eaux souterraines, de la disponibilité d’installations publiques d’assainissement et du type de produits disponibles sur le marché. Il peut s’avérer utile de faire appel à des organismes externes lorsque les capacités internes sont limitées. Une meilleure compréhension de ces aspects permettrait à l’IMF de concevoir des produits sur mesure et de passer des contrats de services avec les fabricants et les prestataires de services WASH.
  • L’éducation et la sensibilisation des clients sont essentielles pour la commercialisation des produits : L’importance accordée à l’éducation et à la sensibilisation des clients est un facteur clé pour l’adoption des produits. Par exemple, une prise de conscience accrue des effets néfastes de l’eau non potable ou de la défection en plein air sur la santé peut conduire à une plus grande adoption de filtres à eau ou de toilettes hygiéniques, ou des deux. Les partenariats avec les ONG peuvent s’avérer utiles comme stratégie pour la mise en œuvre de telles campagnes d’information. A titre d’exemple, Grameen Koota, une IMF indienne, travaille avec une ONG, Navya Disha pour sensibiliser ses clients avant d’introduire des produits financiers pour soutenir les activités WASH.

WASH représente une opportunité passionnante permettant aux IMF d’avoir un impact significatif sur la vie de leurs clients et de les aider dans leur lutte contre la pauvreté. Ils doivent toutefois prendre en compte les questions débattues jusqu’à présent afin d’exploiter cette opportunité d’une manière durable.

Pour aider les IMF à aborder les problèmes de manière efficace, MSC, en collaboration avec Water.Org, a développé une série de boîte à outils pour aider les IMF à créer et à gérer des produits de financement WASH. Les outils s’inspirent des programmes de financement WASH réussis et contiennent des exemples pratiques et des orientations détaillées sur divers aspects de la gestion d’un programme de financement WASH.

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Écrit par

jayan-nair

MSC