L’utilisation de l’argent mobile et des données transactionnelles ont ouvert l’accès aux prêts à court terme qui étaient jusque-là inexploités. L’accès aux prêts instantanés a pour vocation d’aider les MPME et les particuliers à répondre à leurs besoins quotidiens en matière de trésorerie et à tirer parti des occasions d’affaires. Il s’agit du crédit digital qui se présente comme une alternative au crédit traditionnel et une réelle opportunité. JUMO acteur majeur du crédit digital opérant au Ghana, au Kenya, en Tanzanie, Ouganda et en Zambie révélait dans une enquête menée par le CGAP que 81% des emprunteurs n’avaient jamais contracté un emprunt dans une institution financière formelle. En utilisant le canal numérique et de nouveaux modèles d’affaires, les institutions financières peuvent pénétrer de nouvelles zones géographiques ou des segments de marché qui seraient des cibles inatteignables si celles-ci utilisaient une approche de crédit traditionnelle.
Par Achille Tefong, et Bocar Anne, Février 2020
L’utilisation de l’argent mobile et des données transactionnelles ont ouvert l’accès aux prêts à court terme qui étaient jusque-là inexploités. L’accès aux prêts instantanés a pour vocation d’aider les MPME et les particuliers à répondre à leurs besoins quotidiens en matière de trésorerie et à tirer parti des occasions d’affaires. Il s’agit du crédit digital qui se présente comme une alternative au crédit traditionnel et une réelle opportunité. JUMO acteur majeur du crédit digital opérant au Ghana, au Kenya, en Tanzanie, Ouganda et en Zambie révélait dans une enquête menée par le CGAP que 81% des emprunteurs n’avaient jamais contracté un emprunt dans une institution financière formelle. En utilisant le canal numérique et de nouveaux modèles d’affaires, les institutions financières peuvent pénétrer de nouvelles zones géographiques ou des segments de marché qui seraient des cibles inatteignables si celles-ci utilisaient une approche de crédit traditionnelle. Le crédit digital sert un besoin clair et peut s’étendre rapidement. Cependant, il faut prendre en compte les risques potentiels, afin de créer un état de confiance et ne pas endommager la réputation du secteur bancaire.
Le crédit digital, qui fait partie des services financiers digitaux de seconde génération est au centre de plusieurs débats. Ces discussions portent majoritairement sur les aspects clés de succès d’un tel service, son caractère responsable, mis en lumière par : la considération/protection du client et de ses données, la tarification appropriée, la sécurité des services et la limitation du risque de surendettement. La finalité recherchée étant d’attirer de nouveaux clients, de les fidéliser et susciter le renouvellement de leur commande. Les risques potentiels encourus par le consommateur imposent donc aux fournisseurs une gestion proactive dans la conception et la mise sur le marché d’un tel produit.
Tableau : Evolution de produits financiers digitaux
Rendre le crédit digital responsable c’est le centrer sur le consommateur final
L’objectif majeur de chaque fournisseur de services financiers digitaux est de garantir une proposition de valeur forte de son produit/service auprès des cibles, et gagner chaque jour des parts de marché. Cependant, un marketing direct et agressif peut inciter les clients à s’engager dans des comportements d’emprunt à haut risque, au-delà de la valeur du produit proposée. L’étude conduite par MSC, SPTF et Smart Campaign sur le paysage du crédit digital au Kenya révèle selon les données relatives à l’offre que 2,2 millions (4,2% de la population totale du pays) d’emprunteurs de crédit digital au Kenya ont contracté des prêts non productifs[1] et qu’environ 1,43 millions d’emprunteurs (dont 49% à moins de 10 USD) sont négativement fichés, avec un solde inférieur ou égal à 50 USD. Avec un faible niveau d’éducation financière, il incombe davantage aux fournisseurs de gérer de façon proactive les risques sous-jacents. Des conditions simples et claires sont de la responsabilité de tous les partenaires et doivent être facilement accessibles (via USSD, une application, un affichage dans les points de retrait par exemple). En raison de l’accès rapide et facile des prêts numériques, il est important de rappeler continuellement aux utilisateurs leurs obligations vis-à-vis du prêt avec des rappels de paiement et des pénalités imposées sur les retards de paiement.
En Afrique de l’Ouest, le succès très mitigé de l’offre PAMF et Orange au Mali (Singa Ni Mara), ainsi que le démarrage au ralenti de l’offre MTN & Bridge Bank ‘Momo Kash’ en Côte d’Ivoire, démontre que le développement de ce produit/service nécessite une démarche structurée encore plus stricte. Le matériel promotionnel doit tenir compte du niveau d’éducation numérique et financière des potentiels utilisateurs, s’assurer que tous les frais de prêt, les modalités et les conditions sont clairement énoncés. Les fournisseurs doivent également tenir compte de la fonctionnalité limitée offerte par les téléphones de base et mettre en place un système de recours adapté, avec une définition claire des rôles et responsabilités de chacun. Les souscripteurs à un crédit digital doivent être informés qu’ils ont la possibilité (et le droit) d’accéder à des systèmes de règlement des plaintes et de demander réparation pour les erreurs commises ou autres actes illégaux.
Rendre le crédit digital responsable c’est observer les contraintes de protection des clients
Développer un produit de crédit digital responsable impose le respect de certains principes fondamentaux tels que ceux énumérés par Smart Campaign et de pratiques dans le traitement des clients, garantissant ainsi la confidentialité des données et leur protection. Nous présentons ci-dessous ceux qui nous semblent les plus pertinents.
Schéma 1 : Le socle du crédit digital responsable/durable
Prévention du surendettement : L’un des attributs du crédit digital c’est le faible montant pouvant être accordé aux clients, qui enferme ceux-ci dans un cycle d’emprunts coûteux (prêts multiples), surtout s’ils ne sont pas suffisamment informés sur la capacité de remboursement. L’accent doit être mis sur la limitation des prêts par une tarification responsable[1] et un partage solide de l’information de crédit.
Confidentialité des données des clients : les moyens de collecte d’informations détaillées (médias sociaux, les journaux d’appels et de SMS, géolocalisation…) sur les clients ainsi que leur usage afin d’offrir le produit doivent être connus et acceptés des clients. Par ailleurs, le respect des lois nationales sur la protection de la confidentialité et de la sécurité de l’information d’un client s’impose. Informez clairement les consommateurs sur des données qui seront recueillies et de la façon dont elles seront utilisées, avant sa collecte, et recevez leur consentement explicite à cet égard.
Tarification responsable : Le mode de gestion du prestataire devrait s’inscrire dans une perspective de pérennité afin de fournir des services à long terme.
Distribution appropriée : Les produits offerts sont souvent standards et ne sont pas adaptés à tous type de clients. Il devrait exister une adéquation cible – canal de distribution.
Transparence, traitement équitable et respectueux des clients : Tous les renseignements importants sur le produit, en particulier les informations relatives au prix, au partage des données personnelles, doivent être donnés aux clients afin de leur permettre de comprendre et de faire des choix éclairés. Bien que le crédit digital implique peu de contact physique, certaines questions liées au traitement des clients continuent d’avoir une incidence sur la crédibilité des services.
Mécanismes de résolution des plaintes : L’absence de contact de personne à personne et la présence d’un nombre important de partenaires dans la plupart des modèles de crédit digital accroît le défi d’offrir des processus adéquats de résolutions des plaintes.
De ce fait, pour mieux concevoir et positionner sur un marché donné une offre de crédit digitale et garantir le gain de nouvelles parts de marché tout en fidélisant ses clients, il est important d’anticiper les contraintes et prendre en compte les aspects qui confèrent le caractère responsable d’un tel service. L’objectif n’est pas uniquement d’avoir des clients, mais de « bon » clients, ceux qui sont satisfaits et qui renouvellent leur commande, ceux qui s’inscrivent sur la durabilité. Il est d’ailleurs recommandé d’avoir recours à une expertise externe qui serait à même de mieux identifier ces contraintes externes. Une telle démarche garantirait le succès à long terme (taux d’adoption et d’utilisation) de votre produit crédit digital.
[1] Les prêts non productifs sont les prêts dont le solde n’a pas enregistré de remboursement depuis plus de 90 jours.
[2] Une tarification responsable signifie que les tarifs, termes et conditions sont définis d’une façon qui est abordable pour les clients et durable pour les institutions financières
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