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La FinTech face à la crise – 2ème partie : sept approches pour survivre à la pandémie de COVID-19

  • user by Rebecca Szantyr
  • time Jul 6, 2020
  • calendar 6 min

Cet article présente les différentes stratégies que les FinTechs peuvent suivre, quelle que soit leur taille, pour s’adapter à la situation et relever les défis engendrés par la pandémie de COVID-19.

La FinTech face à la crise – 2ème partie : sept approches pour survivre à la pandémie de COVID-19

Akshat PathakAnshul SaxenaSunil Bhat et Anil Gupta, juin 2020

Comme évoqué dans le premier volet de cette série de deux articles, la pandémie de COVID-19 a engendré des défis sans précédent pour le secteur des services financiers, en particulier sur les marchés émergents. Alors que le secteur reste aux prises avec la situation sanitaire, les mesures de confinement et une incertitude économique croissante, les FinTech doivent repenser leur stratégie pour résister à la crise et saisir de nouvelles opportunités.

Depuis le 15 avril, MSC s’est entretenu avec un large éventail de FinTech, d’investisseurs, de décideurs politiques et d’associations professionnelles de six marchés émergents (Bangladesh, Côte d’Ivoire, Inde, Indonésie, Sénégal et Vietnam) pour mieux comprendre comment ces différents acteurs font face à la crise. En l’absence de guide de référence ou de précédent auquel se référer, les entreprises FinTech s’efforcent de leur propre chef de s’adapter à ces temps difficiles. Certaines ont mis au point de nouveaux outils et services, tandis que d’autres proposent des services existants avec des ajustements innovants. Il ressort de nos discussions et d’autres analyses que les FinTech sont en train d’adopter plusieurs mesures clés pour rester pertinentes, accélérer leur redressement et renforcer leur résilience pendant cette crise. Nous examinons ci-dessous sept approches utilisées par les FinTech pour surmonter les défis engendrés par la pandémie.

1.La capacité d’adaptation est à la base de tout

Il est clair que l’heure est au changement et à l’adaptation à de nouvelles circonstances. Une start-up FinTech/logistique que nous avons rencontrée a ainsi modifié sa stratégie commerciale et son infrastructure de distribution pour s’adapter aux nouvelles priorités et demandes de sa clientèle rurale, qui est passée de produits discrétionnaires à des produits essentiels. Elle compense ainsi des marges beaucoup plus faibles sur la distribution de produits essentiels par des volumes plus importants et des délais de rotation plus courts.

2. L’improvisation est indispensable à la survie

Beaucoup d’entreprises FinTech s’appuient sur la vérification en personne de l’identité des clients. Pendant la pandémie, certaines d’entre elles sont passées à la vérification par appel vidéo tout en maintenant les normes d’assurance qualité promises. Cette improvisation leur a permis de poursuivre leur activité tout en réalisant des économies substantielles sur la logistique.

3. Les pratiques commerciales éthiques sont plus que jamais d’actualité

Les mesures de confinement de type « lockdown » ont provoqué des achats de panique chez les consommateurs soucieux de se constituer des stocks de produits essentiels et non essentiels. Quelques entreprises opportunistes ont réagi en augmentant considérablement leurs prix. Les FinTech qui ont répondu à notre enquête estiment toutefois qu’il est important de rester fidèle à son éthique. L’une d’elles a ainsi honoré son engagement d’aider les agriculteurs à obtenir un prix équitable pour leurs produits. Autorisée à poursuivre ses livraisons de produits essentiels dans les zones de confinement en Inde, elle a continué à facturer ses prix habituels à sa clientèle de détaillants qui étaient prêts à payer davantage. Cette approche porte ses fruits : certains détaillants importants sont prêts à lui accorder en retour le « droit de premier refus » pour les commandes de grandes quantités qu’elle pourrait avoir du mal à livrer.

4. L’empathie envers les clients est l’ingrédient secret de la réussite

Les FinTech de crédit et de prêt auxquelles nous avons parlé partagent un souci commun : celui que les emprunteurs ne soient pas en mesure de rembourser leurs emprunts pendant la crise. Face à l’imminence des impayés provoqués par la perte de revenus, certaines d’entre elles ont adopté une autre approche, offrant la possibilité de convertir les prêts à court terme (1 à 4 mois) en prêts à plus long terme (4 à 8 mois), moyennant des frais de dossier peu élevés. Si les impayés sont ainsi maîtrisés, certains clients sont même prêts à payer plus que le montant de leurs échéances, qui ont maintenant été réduites.

5. L’innovation reste à l’ordre du jour

L’apparition de la pandémie a amené beaucoup de consommateurs à se constituer des réserves de produits alimentaires, de produits de première nécessité et d’argent liquide. Les banques centrales des marchés couverts par notre recherche font état d’une forte augmentation du numéraire en circulation et des retraits d’espèces au cours des quatre dernières semaines. Malgré les mesures de confinement, la demande d’argent liquide en tant que « valeur refuge » continue d’augmenter, notamment au sein des communautés à faible et moyen revenu qui se préparent à affronter des jours difficiles. Cette situation affecte les FinTech qui commercialisent des produits d’épargne. Certaines d’entre elles réfléchissent à des solutions innovantes pour enrayer la diminution de leur clientèle, en ajoutant par exemple des produits complémentaires à leur offre (nano-assurance par exemple).

6. La pertinence est la clé de la prospérité

L’ampleur de la pandémie et les difficultés sanitaires et économiques qui en découlent ont submergé le secteur des services financiers, en particulier les assureurs. Certaines « AssurTech » et FinTech établies proposent toutefois des produits utiles et abordables pour aider les communautés à faible et moyen revenu à se protéger. Une start-up FinTech indienne a rapidement évalué la situation et mis en place une offre « à la carte » issue de différents fournisseurs de contrats d’assurance, ce qui permet aux clients de choisir exactement la couverture dont ils ont besoin. Une autre FinTech propose des produits de nano-assurance en matière d’assurance vie et d’assurance décès qui comprennent une couverture hospitalisation pour la COVID-19, en partenariat avec une grande compagnie d’assurance, moyennant une prime annuelle de 8 à 14 USD.

7. L’ironie du moment : les preneurs de risques sont les plus averses au risque

Les sociétés de capital-risque et de capital-investissement (private equity) sont censées figurer parmi les principaux preneurs de risque, car elles investissent dans la classe d’actifs la plus risquée qui soit : les start-ups. Dans un scénario habituel de repli des marchés, ces sociétés profitent de l’occasion et se tiennent prêtes à financer ou acquérir des start-ups FinTech. Cependant, dans le contexte actuel d’incertitude économique, certaines de ces sociétés sur les marchés que nous suivons se demandent quelles sont les FinTech qu’elles continueront de financer et quelles sont celles qu’elles abandonneront dans le souci de se concentrer sur leurs investissements les moins risqués. Anup Jain, associé gérant chez Orios Venture Partners, résume bien le sentiment général des investisseurs aujourd’hui lorsqu’il déclare : « Les fonds vont maintenant préserver au maximum leurs munitions pour financer leurs propres entreprises en portefeuille ».

Avec des investisseurs qui hésitent à continuer de financer les FinTech les plus risquées, nous pourrions observer une baisse de l’activité d’investissement sur le deuxième trimestre de 2020 et au-delà.

Perspectives pour les prochains mois

Il est clair que nous vivons une époque incertaine. Une approche qui fonctionne aujourd’hui pourrait ne plus fonctionner demain. De nouvelles approches plus innovantes sont pourtant déjà en train d’émerger, les FinTech s’efforçant de s’adapter à des circonstances qui évoluent rapidement. Grâce à ses recherches holistiques multi-pays sur les FinTech et leurs partenaires de l’écosystème, MSC continuera de suivre et d’évaluer les réponses politiques, réglementaires et sectorielles, d’analyser le climat d’investissement et celui de la FinTech dans son ensemble.

Notre objectif consiste à concevoir des programmes d’intervention en faveur des FinTech pour les aider à survivre, à se relever, à se maintenir et à se développer, en visant notamment celles qui s’adressent aux segments à faible et moyen revenu. Nous continuerons de partager nos conclusions avec les régulateurs, les décideurs politiques, les partenaires de l’écosystème et les investisseurs pour permettre aux FinTech d’exercer leur activité aussi efficacement que possible et de jouer un rôle positif pendant la pandémie.

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Cet article a également été publié sur Next Billion le 1er juin 2020.

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