Étude sur la l’impact de la Covid-19 sur les réseaux d’agents au Sénégal

Étude sur la l’impact de la Covid-19 sur les réseaux d’agents au Sénégal

Elizabeth BERTHE, Mamadou DIALLO, Axelle KADIO-MOROKRO, Abdoulaye SECK, Shailey TUCKER , Novembre 2020

En partenariat avec la Fondation Mastercard, MSC a conçu et conduit une étude sur l’impact de la Covid-19 sur les réseaux d’agents CICO au Sénégal.

Les objectifs de cette étude étaient les suivants :

  • Comprendre et quantifier les répercussions de la Covid-19 sur les agents
  • Orienter les politiques et mesures ultérieures de soutien pour la reconstruction des réseaux d’agents
  • Évaluer l’impact de la Covid-19 sur :

– les revenus et les coûts
– les chaînes d’approvisionnement
– l’activité des entreprises et leur gamme de produits
– la gestion de la liquidité

Examiner les possibilités de minimiser les risques et de maximiser les opportunités commerciales

Évaluer les implications liées au genre

Comprendre l’utilisation actuelle des canaux de communication et identifier les opportunités à exploiter

Comprendre le rôle des réseaux d’agents et l’impact de la pandémie sur les réseaux d’entrepreneurs et la confiance

Évaluer les services de soutien des secteurs privé et public

Lire le rapport en anglais ici

Le e-commerce a-t-il une chance en Afrique?

Le e-commerce a-t-il une chance en Afrique?

Par Parfait Aho Seka et Kate Assi Okoué Février 2021

Michel, 39 ans, enseignant vivant à Dakar, a effectué des achats sur un site de e-commerce. Au moment de payer, il constate qu’il dispose de peu d’options de paiements. A la livraison, il aperçoit avec surprise une très grande différence entre ce qu’il reçoit et ce qu’il pensait avoir acheté. De plus, sa commande est arrivée très en retard avec un emballage endommagé. Madeleine, 46 ans, cadre de banque, vit à Abidjan ; elle a commandé une tablette enfant pour la fête de noël sur un autre site de e-commerce, qui n’a jamais fonctionné.

En 2019, seuls 28% des africains utilisaient Internet, et les acheteurs en ligne sont encore relativement peu nombreux. Ils devraient atteindre 39,5% en 2025. Fidéliser et satisfaire les clients comme Michel et Madeleine est essentiel pour la pérennité des e-commerçants. Il est important de comprendre les facteurs qui déterminent la satisfaction des clients et leur choix de boutiques en ligne. Le processus d’achat comprend les étapes suivantes : reconnaissance du problème/besoin, recherche d’informations, évaluation des alternatives, décision d’achat et comportement après l’achat. La satisfaction du client est le résultat de l’expérience qu’il a à travers les différentes étapes du parcours utilisateur, se concluant par l’acte d’achat. Les acteurs du e-commerce ont besoin de plus d’adoption et de fidélisation des consommateurs pour être des entreprises viables. D’ailleurs, la plupart des clients potentiels en Afrique subsaharienne se sentent plus à l’aise de faire leurs achats hors ligne car ne sont pas totalement convaincus par les avantages des achats en ligne, notamment les délais de livraison ou les facilités de paiement en ligne.

Les défis et comment les surmonter

Voici les cinq principaux défis du e-commerce en Afrique, et comment les services d’e-commerce peuvent les surmonter:

1. Manque de confiance 

Les réseaux sociaux enregistrent chaque jour des plaintes d’utilisateurs de sites marchands, ce qui contribue à maintenir le manque de confiance des internautes vis-à vis du commerce en ligne. Pourtant, cette confiance est indispensable et doit être cultivée pour développer les activités digitales et assurer  une parfaite collaboration, cohésion et synergie entre les acteurs. La confiance est un problème majeur  : la réputation de l’un ne s’étend pas à l’autre, et il n’existe pas encore de plateforme ayant de portée réellement significative.

Les détaillants ont besoin de repenser leur stratégie digitale, pour créer un environnement sûr et sécurisé, et une expérience engageante.  Notre recherche sur les transferts d’argent nous a montré que les utilisateurs n’ont pas confiance en la sécurité des transactions en ligne.  Il est important d’avoir des badges de confiance pour offrir de la sécurité et le protocole HTTPS en place sur les sites internet en est une illustration. Les badges de confiance, également appelés sceaux de confiance, sont des logos qui confirment l’authenticité de votre site Web. Cela devrait être associé à l’éducation numérique qui est indispensable pour comprendre comment fonctionnent les paiements en ligne et pour savoir comment accéder au service clientèle. Les vidéos sur les réseaux sociaux sponsorisées par les plateformes peuvent aussi aider. L’analyse des données devrait être utilisée pour améliorer la formation au service à la clientèle.

2. Connectivité 

En Afrique, l’accès à internet continue d’être relativement onéreux avec une couverture géographique limitée et une qualité décriée. Sur le milliard d’habitants africains, seuls 453,2 millions personnes sont utilisateurs d’internet. Les forfaits internet quant à eux ont évolué pour devenir plus accessibles (des offres à partir de 100 FCFA/jour mais qui offrent peu de data et un accès qu’aux réseaux sociaux ou à des packages jour, semaine et mois incluant des minutes d’appels, sms, data).

Le continent compte un grand nombre d’agents pour les services financiers mobiles qui ont gagné la confiance des communautés locales et de leur environnement proche. Les sites de e-commerce comme Jumia disposent de point relais pour les livraisons. Ces agents pourraient servir de relais pour les commandes et même pour la livraison pour une catégorie d’articles à cause des dispositions logistiques à prendre. Ce modèle commercial offre plus de revenus aux agents par client, ce qui permettrait aux agents ruraux de devenir plus facilement viables et d’offrir les services de CICO ( encaissement / décaissement) malgré les faibles densités de population.

Malgré l’augmentation du nombre de propriétaires de smartphones, les téléphones de base continuent à dominer.  Afin de ne pas créer une plus grande fracture numérique, ce marché peut être desservi par le commerce téléphonique via les centres d’appels.  Le centre d’appel peut créer la commande en ligne et le faire livrer au kiosque d’un agent.  Si le commerçant ne dispose pas d’un centre d’appel, il peut explorer les opportunités pour travailler avec les centres d’appels existants.

3.  Logistiques

Avec un manque d’adressages des rues et habitations et de mauvaises infrastructures, la logistique continuera à être difficile.  Les moyens logistiques qui garantissent une livraison à bonne date ne sont pas toujours disponibles. Pour assurer la confiance des clients, il faut constamment communiquer avec lui sur les étapes de la livraison, via appels et SMS. S’il est vrai que chaque marché a ses contraintes, il existe quelques approches intéressantes comme Sendy au Kenya. C’est une plate-forme interentreprises qui offre des services de livraison de colis porte à porte à la demande et qui a fait des partenariats avec des sites d’e-commerce. On peut également citer Sokowatch, un fournisseur de biens en ligne pour les micro-détaillants qui fait des livraisons pour les commandes sur les sites d’e-commerce. Les partenariats avec des tiers peuvent contribuer à combler le fossé en matière de logistique comme la plateforme glovo.

4.  Une réelle préférence pour le toucher

Culturellement les peuples africains préfèrent le contact et la chaleur humaine. Dans le commerce, le retail est très présent et les ménages s’orientent systématiquement vers les commerces de proximité (boutiques de quartier, marchés et supérettes) plus chaleureux, ils y ont des affinités, peuvent vérifier les articles achetés et obtenir des facilités. Sur le site internet, la quantité et la crédibilité de l’information sont des éléments clés pour garantir la qualité du service dans les achats en ligne lorsque le consommateur ne peut pas toucher la marchandise. La quantité d’informations fait référence à la capacité d’accéder aux informations adéquates lors d’un achat en ligne (par exemple, comparaison de prix), tandis que la crédibilité fait référence au degré de confiance des consommateurs dans les informations fournies par les vendeurs en ligne. Jusqu’à présent l’électronique, la mode et le tourisme (avant la Covid-19) sont à la tête du mouvement du e-commerce. A cet effet, les descriptions détaillées sont importantes.  Pour les jeunes Ivoiriens, Jumia est le plus populaire, suivi par Facebook et Instagram.

Il existe une vraie opportunité de collaboration avec les petits commerçants qui peuvent prendre les commandes et avoir en stock des échantillons pour permettre aux clients de toucher la marchandise. En plus de pouvoir offrir une vitrine au plus petit commerçant, le e-commerce permettra de générer des revenus et sera peut être un élément fédérateur des communautés (jeunes, femmes) vers des activités agricoles ou artisanales  et des petits « métiers » dont les produits seront proposés à ce vaste marché. L’utilisation de la technologie digitale et des services financiers digitaux a la possibilité de conduire plus de jeunes vers le secteur agricole.

5. Le cash est toujours le roi

Au sein des populations peu ou pas scolarisées, les échanges se font principalement en espèces. Malgré les risques liés aux transactions en cash, il reste le seul moyen de paiement accepté par tous car il ne renferme pas de risque de compensation, de connectivité, d’énergie etc. Les limites au niveau des infrastructures économiques et logistiques qui tendent à s’améliorer mais sont pour la plupart dégradées et les moyens de paiements électroniques qui se développent, mais ne sont pas tous interopérables, contribuent à maintenir le cash très présent dans les échanges.

Suivre la mouvance de l’interopérabilité des services financiers digitaux contribuera à une plus grande adoption des services offerts par les différentes acteurs (Banques, Etablissements financiers, EME, IMF, FinTech, …)et augmentera les facilités de paiement.

Assurer le développement du e-commerce

L’arrêt des activités en Afrique de  Cdiscount, Afrimarket, Yatoo, Jumia Cameroun est une preuve de la complexité de l’environnement et une interpellation à
l’adaptation des offres aux réalités du marché pour survivre. En Afrique, les communautés sont indispensables dans l’adoption d’une offre. Leurs avis influencent fortement l’offre.  Le développement du e-commerce sera donc inéluctablement conditionné par la confiance des consommateurs qui devra passer par :

  • Le développement de partenariats pour plus de proximité à travers les agents où d’autres points relais bénéficiant de la confiance des communautés,
  • L’adaptation ou l’amélioration des parcours clients ou des canaux de distribution pour toucher une plus large cible aussi bien en zone rurale qu’urbaine.
  • L’utilisation des outils technologiques les plus répandus pour mieux communiquer avec le client ( SMS, WhatsApp, les services vocaux via les réseaux sociaux.)

Ces actions devront s’appuyer sur le résultat d’études comportementales et des habitudes des communautés pour intégrer leurs besoins comme le prône l’approche MI4ID (Market Insights for Innovation and Design) conçue par MSC qui met le client ou consommateur au cœur de la conception de produits et services qui lui sont destinés. En plus, il faudra pour que les activités se pérennisent, une qualité du référencement et une parfaite maîtrise des coûts au niveau des partenaires intervenants dans la chaîne de service.

Etats des lieux sur la protection des données en Afrique

Etats des lieux sur la protection des données en Afrique

Février 2021

La Covid-19 a clairement accéléré la transformation digitale des entreprises en Afrique. La gestion des données en est un axe majeur, mais la protection des données en Afrique est inégale. Avec l’augmentation du volume de données échangées, les opportunités se démultiplient mais les risques également. Mis en place en mai 2018, le Règlement Général sur la Protection des Données (ou RGPD) vise à responsabiliser les entreprises sur la gestion des données personnelles.

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L’opportunité à double tranchant de la COVID-19 sur le numérique : Facilité des transactions mais boulevard pour les cyberattaques ?

L’opportunité à double tranchant de la COVID-19 sur le numérique : facilité des transactions mais boulevard pour les cyberattaques ?

Par Rocky Abdoul MILINGITA, Rebecca Szantyr et Elizabeth Berthe, décembre 2020

Selon les analyses de l’entreprise marocaine Dataprotect de janvier 2020, portant sur 148 banques de l’Union européenne, de l’UEMOA, du Gabon, du Congo et de la RDC, plus de 85 % de leurs institutions financières déclarent avoir déjà été victimes d’une ou plusieurs cyberattaques ayant entraîné des dommages, parfois à répétition. Il s’agit d’abord de fraudes sur les cartes bancaires (dans 30 % des cas) ou d’hameçonnage. Le coût de la cybercriminalité est estimé à 3,5 milliards d’euros en Afrique. Seuls 6 % des incidents sont découverts par les employés de cybersécurité, et 55 % des institutions financières recourent à la sous-traitance pour leurs activités de cybersécurité. Selon JeuneAfrique, entre janvier et août 2020, 28 millions de cyberattaques ont eu lieu en Afrique.

En cette période où la pandémie de la COVID-19 n’épargne presque aucun coin de la Terre, beaucoup de gouvernements ont préconisé des mesures de protection encourageant les transactions en ligne. Les institutions financières n’étaient pas forcément préparées à cette montée de transactions digitales, ni les populations sensibilisées aux différentes menaces liées à l’utilisation du digital. Avec cette augmentation de transactions numériques, un volume croissant de données numériques sensibles augmente de manière exponentielle.  Cette augmentation est susceptible de perdurer et avec elle le potentiel d’impact des violations de données des personnes et des systèmes. Il devient donc impératif de renforcer les capacités et d’investir dans des mesures de protection contre l’accès illicite à ces données.  Le retour au niveau antérieur à la COVID-19 sera lent, mais les investissements dans la modernisation des capacités techniques contribueront à réduire les risques liés à l’ère numérique.

Souvent quand on analyse des acteurs de l’écosystème de la finance digitale, l’attention est particulièrement portée sur les fournisseurs de services financiers digitaux, partenaires, clients-utilisateurs, régulateurs. Cependant, un autre groupe d’acteurs vient se greffer à cet écosystème avec des conséquences néfastes : les arnaqueurs. L’opportunité offerte aux entreprises grâce au digital semble être la même aux cyberattaques.

Le secteur financier, y compris les banques et autres institutions financières, subit environ 300 % de cyberattaques en plus que tout autre secteur.  Selon Dataprotect, qui a enquêté sur 148 banques dans l’UEMOA, le Gabon, la RDC et le Congo, les pertes moyennes des banques ayant signalé des cyberattaques sont estimées à 770 000 euros (environ 852 350 dollars US) pour les dernières années, tandis que le coût moyen de chaque infection informatique due à un logiciel malveillant coûte 9 000 euros (environ 9 963 dollars US) aux entreprises.

Pourquoi les banques sont vulnérables

Trop souvent, les entreprises ne pensent pas à allouer un budget dédié à la sécurité informatique pensant que c’est un coût superficiel. Cette même étude a noté que les banques interrogées investissent chaque année au moins 500 000 euros (environ 553 475 dollars) pour faire face aux menaces de cybersécurité, tandis que 50 % d’entre elles ont indiqué un investissement annuel compris entre 100 000 et 500 000 euros (environ entre 110 695 et 553 475 dollars).  Oui, vous avez bien lu, les budgets sont plus faibles que les pertes.

La demande de professionnels de la cybersécurité a dépassé l’offre de travailleurs qualifiés.  En raison du nombre limité d’experts disponibles, les banques externalisent souvent la cybersécurité, préférant se concentrer sur leur activité principale.

Le renforcement des capacités en matière de cybersécurité peut renforcer la stabilité financière et favoriser l’inclusion financière.  Les employés du secteur financier ont tendance à ne pas être sensibilisés aux cyber-menaces telles que les courriels de phishing, ce qui laisse les entreprises ouvertes aux “pirates”.   Parmi les autres types de fraude qui touchent fréquemment les services financiers numériques, figurent les délits d’initiés ayant l’intention de causer un préjudice (le type de fraude le plus courant), les logiciels malveillants, les logiciels de demande de rançon et de refus de service et les escroqueries en général. Une autre étude portant sur plus de 700 organisations du secteur bancaire en Afrique a indiqué que 75 % des organisations n’utilisaient pas de techniques de test de sécurité, 60 % ne se tenaient pas au courant des tendances et des attaques en matière de cybersécurité, et 75 % des vulnérabilités identifiées au sein des organisations concernaient des correctifs manquants et des mises à jour de logiciels.

Les institutions financières doivent évaluer leur niveau de préparation à la cyberactivité, déterminé en utilisant l’outil d’évaluation de la cybersécurité du FFIEC au moins une fois par an. Après avoir attribué des niveaux de risque à chaque catégorie, l’institution doit examiner et évaluer les domaines autour de la gestion et de la surveillance des risques cybernétiques, du renseignement sur les menaces et de la collaboration, des contrôles de cybersécurité, de la gestion des dépendances externes et de la gestion et de la résilience des incidents cybernétiques.

cybersecurite

Nous savons, grâce à notre travail dans le domaine des services financiers numériques, que les fraudeurs se transmettent mutuellement leurs combines.  Bien que différentes institutions financières se protègent en solo ou développent des mécanismes de protection, une gestion  collaborative face aux risques de cyberattaques est indispensable pour assurer la cybersécurité de tous : le partage d’expérience. Dans la zone UEMOA, les institutions devraient créer un environnement de partage des leçons tirées, des personnes impliquées et des modes opératoires avec leurs collègues opérant dans le secteur des services financiers mais aussi avec les organismes de réglementation parce que la cybersécurité ne s’improvise pas. Le partage de connaissances permettrait d’exploiter les synergies et de développer des produits communs. Pour cela il est important de travailler sur le renforcement des compétences des ressources humaines afin d’être à la hauteur des géants de la cyberattaque.

Besoin de renforcement de lois sur la cybersécurité

Le problème, c’est que la cybersécurité est peu présente en Afrique de l’Ouest voire inexistante. L’absence de lois sur cette problématique est en partie responsable de cette situation. Selon Verengai Mabika, conseiller politique principal pour l’Afrique auprès de l’organisation à but non lucratif Internet Society, « De nombreux pays n’ont toujours pas ratifié la Convention de l’Union africaine sur la cybersécurité et la protection des données personnelles, connue sous le nom de « Convention de Malabo », qui pourrait fournir un cadre pour répondre à ces menaces ». Selon lui, la cybersécurité ne semble pas être une priorité absolue pour la plupart des pays africains.  En effet, le cadre réglementaire semble toujours être un chantier en construction. Parmi les 55 pays africains, seuls 14 ont signé cette convention (dont le Bénin, la Guinée, la Mauritanie, le Sénégal, la Tunisie et le Togo) et 3 seulement l’ont ratifiée (le Sénégal, le Togo et l’île Maurice).

Quelle cybersécurité pendant et après la COVID-19 ?

La numérisation de la finance, tant pour les particuliers que pour les entreprises, peut réduire les coûts et ouvrir de nouvelles possibilités de marchés et de moyens de subsistance – aider les pays à mieux se reconstruire après la COVID-19. 

Il nous paraît inconcevable aujourd’hui d’imaginer une vie sans internet, la situation sanitaire actuelle nous le démontre d’autant plus, mais le revers de la médaille c’est le perfectionnement des hackers qui ciblent de mieux en mieux et de façon de plus en plus subtiles leurs proies. Les entreprises doivent se retourner très vite pour faire face à cette problématique de sécurité.   Pour vous aider à identifier efficacement les risques liés à la transformation digitale et à proposer des stratégies d’atténuation, l’Institut Helix de MSC, en collaboration avec Mastercard Foundation, organise une formation en ligne , « Gestion des risques liés à la transformation digitale » du 17 Mai au 9 Juillet  2021. Inscrivez-vous !

Semer des graines pour les emplois de demain

Semer des graines pour les emplois de demain

Par Elizabeth Berthe, décembre 2020

Malgré la nécessité de trouver des solutions innovantes aux plus grands défis de l’Afrique subsaharienne, seuls 7 % des Africains s’inscrivent dans l’enseignement supérieur et moins de 25 % des étudiants obtiennent un diplôme en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM). Les économies s’appuient de plus en plus sur les innovations technologiques et les nouveaux emplois  exigeront de nouvelles compétences. En 2050, 70 % de la main-d’œuvre mondiale sera africaine. Il est essentiel d’améliorer à la fois la quantité et la qualité de l’éducation pour permettre aux jeunes de réaliser leur plein potentiel. L’enseignement des STIM est essentiel non seulement pour répondre aux besoins de la future main-d’œuvre, mais aussi pour produire des chercheurs et des innovateurs qui peuvent aider à trouver des solutions aux problèmes insolubles. Sur un continent qui compte la plus grande population de jeunes et qui sera bientôt la plus grande population active du monde, l’éducation et les investissements sont essentiels pour renforcer les capacités en matière de STIM afin de stimuler l’économie de demain. Ce défi doit être l’affaire de tous.

Les travailleurs peu qualifiés seront de plus en plus appelés à utiliser la technologie pour atteindre une plus grande productivité, tandis que les travailleurs hautement qualifiés utiliseront les compétences en matière de STIM pour inventer de nouveaux produits et services. La demande de travailleurs hautement qualifiés a augmenté dans les régions d’Afrique subsaharienne qui ont accès aux câbles sous-marins à haut débit depuis l’Europe et le continent perd 4 milliards de dollars par an en raison de l’externalisation des emplois.  Les jeunes pousses, qui ont souvent une bonne compréhension des défis locaux, sont obligées d’externaliser le travail technique en utilisant leurs ressources limitées en raison du manque de candidats locaux qualifiés.  Cette situation n’est pas propre aux start-ups et elle limite les investissements potentiels, freinant ainsi les bonnes innovations et la croissance. Actuellement, en Afrique, la plupart des emplois dans le domaine des STEM sont effectués par ou sous-traités à des multinationales de Chine, d’Inde et des États-Unis.

Pour obtenir des résultats étendus et durables, les politiques et les réformes doivent établir un engagement crédible, soutenir la coordination et promouvoir la coopération entre tous les acteurs, y compris la mobilisation des ressources du secteur privé.  Les gouvernements doivent tenir compte des besoins de leur environnement spécifique et des moyens à mettre en œuvre :

moyens a mettre en oeuvre

Il est également nécessaire de veiller à ce que les millions de jeunes qui terminent leurs études supérieures soient incités à rester sur le continent pour assurer un développement axé sur les STIM, plutôt que de contribuer à la “fuite des cerveaux” qui, selon l’Union africaine, concerne environ 70 000 professionnels qualifiés chaque année.  Compte tenu des niveaux croissants d’investissement dans les start-ups, des politiques doivent être mises en place pour encourager l’innovation et inspirer l’esprit d’entreprise.

Développer la capacité de la jeunesse pour l’avenir est un sport d’équipe et pas seulement le rôle du gouvernement.  Les donateurs, les incubateurs et les acteurs du secteur privé doivent prendre des mesures pour stimuler les initiatives visant à renforcer les capacités. La tâche est d’autant plus importante que le continent est à la traîne en matière d’infrastructures, d’accès aux technologies et d’éducation.

donateursDonateurs

Le financement des bailleurs de fonds se concentre principalement sur la santé et la recherche  agricole.  Davantage de fonds devraient être consacrés au problème de la mauvaise qualité de l’enseignement de base en sciences et en mathématiques, associé à un système d’enseignement supérieur orienté vers des disciplines comme les sciences humaines et sociales.  Contribuer au renforcement des compétences pour le XXIe siècle en :

  • Investissant dans l’enseignement des STIM et promouvant la création de centres dédiés à cet enseignement
  • Mettant en avant les réussites pour stimuler l’intérêt pour la technologie
  • Exigeant que les initiatives en matière de compétences et d’emploi des jeunes qu’ils soutiennent intègrent la participation du secteur privé
  • Soutenant les programmes de formation dans le secteur informatique, en particulier pour les filles

incubateursIncubateurs

Bien que le nombre de pépinières d’entreprises à travers le continent ait augmenté massivement pour permettre le développement des compétences, beaucoup continuent à ne servir que de sièges car elles manquent de modèles commerciaux et de partenaires durables.  La participation du secteur privé peut encourager les investisseurs à contribuer à la croissance de l’économie, mais elle doit être accompagnée de politiques qui encouragent la collaboration. Parmi les autres recommandations, on peut citer :

  • La promotion des cas modèles d’entrepreneuriat pour renforcer la confiance des jeunes
  • La connection des écosystèmes des incubateurs à d’autres incubateurs de la région pour partager les meilleures pratiques et établir des liens avec les opérateurs existants
  • L’augmentation de l’accès à l’expertise et aux ressources humaines qualifiées, y compris la diaspora
  • L’encouragement au développement de programmes de mentorat qui se concentrent sur la stratégie commerciale, l’élaboration de plans d’affaires, la stratégie de marketing et d’autres conseils aux nouveaux entrepreneurs

seceturPriveSecteur Privé

Les entreprises africaines risquent de prendre encore plus de retard en matière de compétitivité si elles ne reconnaissent pas la nécessité de jouer un rôle en contribuant à la nécessité de collaborer.  Alors que les STIM deviennent une partie intégrante de l’économie, les compétences et les qualifications nécessaires évoluent dans tous les secteurs. Les entreprises peuvent établir des partenariats avec les écoles pour s’assurer que les étudiants sont initiés aux STIM dès leur plus jeune âge et sont mieux préparés aux emplois de demain, tout en veillant à ce que les programmes d’études soient alignés sur les besoins des entreprises. En outre, les entreprises pourraient :

  • Encourager leurs équipes à devenir des mentors ou à adopter l’innovation ouverte
  • Établir des partenariats avec des écoles ou des incubateurs pour renforcer les capacités
  • Financer des programmes de promotion de l’esprit d’entreprise et fournir des crédits, des subventions et une assistance technique aux jeunes entrepreneurs
  • Développer des produits et services financiers éducatifs pour la diaspora et les marchés locaux en partenariat avec les écoles et les jeunes entreprises
  • Travailler avec le gouvernement pour donner la priorité au développement des compétences en matière de STIM

Alors que le continent s’achemine vers la quatrième révolution industrielle (4IR pour « 4th Industrial Revolution »), veiller à ce que les jeunes disposent des bons outils pour les équiper comme il se doit permettra de contribuer aux avancées technologiques de demain. Les compétences de base en matière de STIM doivent être enseignées plus tôt, car un plus grand nombre d’emplois à venir l’exigeront.  Les changements doivent commencer dès aujourd’hui et chacun a un rôle à jouer.  MSC lancera un nouvel outil d’auto-apprentissage de l’entrepreneuriat en janvier 2021 pour contribuer à fournir des compétences afin d’encourager les jeunes et les femmes à élargir leurs horizons grâce à la technologie pour créer des emplois dans la région.  Comment contribuez-vous à la croissance des leaders de demain ?

La prise en compte de l’expérience client : une nécessité pour une meilleure adoption des solutions e-gouvernement

La prise en compte de l’expérience client : une nécessité pour une meilleure adoption des solutions e-gouvernement

Par Kate Okoué-Assi et Achille Tefong, décembre 2020

Comme la révolution industrielle, la révolution digitale a engendré de nombreux changements dans nos sociétés et cela dans tous les domaines. En effet, le digital occupe désormais une place de choix dans notre quotidien et les gouvernements ne sont pas en reste dans cette mouvance. Aujourd’hui on compte plus de 161 e-services existants avec 111 projets en cours de développement à travers la zone UEMOA qui impliquent des paiements en ligne ou des requêtes. Les e-services sont incontestablement d’une grande utilité pour les citoyens cependant les comportements liés à leur adoption varient d’un pays à l’autre. Par conséquent, il est important que les approches soient adaptées pour augmenter leur niveau d’adoption.

Défis rencontrés dans l’adoption des e-services publics

Si la digitalisation des services gouvernementaux semble avoir bonne presse, il n’en demeure pas moins vrai qu’elle rencontre de majeurs défis parmi lesquels le manque de financement et l’inadéquation entre l’offre digitale proposée et le taux d’adoption des citoyens. La démarche de digitalisation utilisée par les États ne place pas toujours le citoyen (l’utilisateur final) au centre du processus de conception quand bien même il serait la cible principale de ces systèmes.

Connectivité

Les problèmes de connectivité constituent un frein, avec un accès internet relativement onéreux et une couverture géographique limitée.  Aujourd’hui, l’accès à la 3G varie entre 24 % au Niger à 85 % au Sénégal. Dans les zones rurales, l’utilisation des téléphones standards est encore répandue. De ce fait, l’adoption des e-services restera restreinte avec les contraintes de l’infrastructure existante. Se fiant à l’indice de connectivité mobile qui mesure les performances des pays par rapport aux principaux facteurs favorisant l’adoption de l’internet mobile (infrastructure, accessibilité financière, préparation des consommateurs contenu et services), l’on note que dans la sous-région, les scores de l’indice vont de 18,1 % (niveau découvreur) au Niger à 44 % en Côte d’Ivoire (niveau émergent) avec de faibles taux de connectivité. L’usage des services mobile money enregistre un taux supérieur à celui de l’internet mobile.  Selon les Autorités de Régulation des Télécommunications et des Postes (ARTP) des pays, au Sénégal et en Côte d’Ivoire, le taux de pénétration de l’internet mobile (3G, 4G…) dépasse 50 % tandis qu’il n’excède pas 30 % au Burkina Faso, au Niger et en Guinée-Bissau. En attendant que l’infrastructure de l’internet s’améliore et que l’accès aux smartphones se développe, il sera nécessaire d’utiliser l’USSD ou des services vocaux car les téléphones standards ne sont pas compatibles. Par ailleurs, les intermédiaires humains pourraient également contribuer à faire accroître l’accessibilité aux e-services publics. En effet, les réseaux d’agents de mobile money peuvent servir comme point de relais pour non seulement les paiements mais également les inscriptions, la communication et comme point de collecte des données.  Les agents jouent une rôle essentiel dans l’adoption des services financiers et aident les gouvernements à offrir des services à distance en dehors des horaires de bureau.

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Identité numérique

L’identité numérique pose également une difficulté majeure. L’identité est une condition préalable à la participation dans la société, en facilitant l’accès aux systèmes de santé et de protection sociale, à l’éducation, aux services financiers et gouvernementaux. Malheureusement, selon les données de 2018 de l’initiative Global ID4D de la Banque mondiale, plus d’un milliard de personnes dans le monde ont des difficultés à prouver officiellement leur identité. Ce qui implique qu’un bon nombre de personnes auront ainsi du mal à accéder aux systèmes gouvernementaux digitalisés.

Qualité du service

L’approche orientée client n’est plus une affaire réservée aux seules institutions privées, mais elle doit s’ériger en règle applicable au sein du secteur public et précisément les gouvernements (Entreprises, Établissement ou Institutions). Ne dit-on pas souvent : « un client satisfait en parle à trois autres potentiels » si l’on ajoute l’effet multiplicateur des réseaux sociaux, nous comprendrons que les problématiques d’inclusion financière, sociale et économique passe également par la centralité du citoyen dans les projets de digitalisation des États. Prenons par exemple, un citoyen sénégalais Mohamadou qui relevait ceci au sujet du projet Couverture Maladie Universel (CMU) J’ai essayé d’utiliser la plateforme pour y enregistrer mes parents mais j’ai été bloqué d’entrée de jeu, quand j’ai appelé le numéro vert personne au bout du fil et croyez-moi j’ai appelé à plusieurs reprises.

Culture numérique

La faible culture des populations aux usages numériques représente également un défi.  Les activités de sensibilisation n’auront pas l’impact escompté tant que les populations n’ont pas confiance en la technologie ou ne s’en servent que très peu.  Afrobaromètre par exemple  rapporte que les femmes sont moins susceptibles que les hommes de posséder un téléphone portable, de l’utiliser tous les jours, d’avoir un téléphone avec accès à l’internet, de posséder un ordinateur, d’accéder à l’internet régulièrement. La reconnaissance de ce fait signifie que des mesures provisoires doivent être prises sur la voie de l’adoption afin de renforcer la confiance en les compétences numériques ainsi que la confiance en les services. Aussi, les services doivent être faciles à utiliser ou les utilisateurs doivent pouvoir se référer à des personnes pour les assister. D’ailleurs au Sénégal, le constat est que les populations préfèrent les services au comptoir. L’on pourrait ainsi déduire que cette approche facilite l’apprentissage.

Comportement à l’utilisation

Les comportements des citoyens à l’utilisation des e-services publics sont influencés par plusieurs facteurs. Parmi ces facteurs, le genre, la confiance au gouvernement, le genre, l’appartenance communautaire. Dans certaines communautés, les décisions relatives à l’utilisation de nouvelles offres ou services sont influencées par les chefs communautaires et guides religieux. Par ailleurs, le fait que dans certaines cultures, toutes les décisions majoritaires soient prises par les hommes constituent un frein à l’adoption de e-services par les femmes. La confiance que placent les populations en les autorités est également un facteur prépondérant dans l’adoption des e-services. Une population qui n’a pas confiance en les autorités s’abstiendra de faire usage des outils à elle proposés.

Importance de l’expérience client

L’ensemble des limitations observées non pas dans la mise en œuvre mais beaucoup plus dans l’adoption et l’utilisation de ses services gouvernementaux digitalisés par les populations révèle que la question de l’expérience client est un indispensable. Chaque citoyen d’un État est un être disposant d’une dimension cognitive qui impacte sa décision d’adopter ou d’utiliser un service Étatique digitalisé (G2P, P2G, B2G). L’expérience client repose sur une démarche structurée qui doit être intégrée tout au long du processus d’implémentation de l’ensemble des projets de transformation digitale des États au profit des citoyens. La figure 1 ci-dessous est une présentation du parcours client à considérer pour permettre au citoyen de partir du stade d’un individu qui ignore l’existence d’un service, à un citoyen qui fait de la promotion du service à terme autour de sa communauté. Cet objectif devrait être le leitmotiv des gouvernements qui doivent se considérer comme des institutions qui ont un objectif de fidélisation et satisfaction des clients que sont les citoyens. L’ambition de la digitalisation n’est-elle pas d’optimiser l’expérience client !

 

Figure 1 : Parcours client

Cette problématique de la centralité du citoyen comme client de l’État prend ainsi tout son sens. MSC a accompagné l’Etat Indien par exemple, qui est présenté généralement comme le modèle en matière de digitalisation des services et des paiements gouvernementaux grâce à l’approche MI4ID (Market Insights for Innovation and Design). Ceci a été fait autour des projets tels que le transfert des avantages directs (Direct Benefits Tranfert), réformant le processus de distribution des engrais, avec un impact sur plus de 118 millions d’agriculteurs.

Le processus de communication Étatique devrait ainsi adopter des messages clés en fonction de l’étape à laquelle se trouve les citoyens de chaque localité. La problématique de culture du numérique est ici pointée du doigt et comme le soulignait Mr Didier Twagirayezu de Smart Africa lors d’un webinaire de MSC sur la question, “De la maturité des populations devrait dépendre l’offre digitale proposée et le niveau de sensibilisation engagé”. Différents modes de communication devraient être adoptés avec des canaux spécifiques.

Aussi, les États doivent de manière consciencieuse s’attaquer non pas uniquement à la mise en disponibilité du service, mais également au taux d’utilisation par les populations. Il s’agit ici de mettre le citoyen au cœur du processus de conception des e-services publics en adaptant une démarche centrée sur les populations. C’est aussi prendre en compte l’ensemble des partenariats potentiels à l’instar des agents et autres structures relais, afin d’assurer la diffusion et la sensibilisation à l’adoption et l’utilisation des e-services publics.