Il n’existe pas de définition universelle d’un réseau d’agents « performant ». Les réseaux d’agents sont avant tout un instrument qui permet aux prestataires de réaliser leurs objectifs dans le domaine des services financiers digitaux. Ces services prennent de multiples formes, qui répondent à autant d’objectifs différents, de la montée en gamme des clients des opérateurs de réseau mobile (ORM) vers des services financiers à la décongestion des agences bancaires ou à la création d’une enseigne commerciale.
Il existe néanmoins un réseau d’agent mieux adapté à chaque type de service. En partant d’une proposition de valeur clairement définie et d’une bonne connaissance de la concurrence, les prestataires de services financiers digitaux ont la possibilité de mettre en place un réseau d’agents qui les aidera à réaliser leurs objectifs, en ayant les bons agents au bon endroit avec une assistance adaptée pour développer et servir une clientèle fidélisée.
En bref, il existe de nombreuses formes de réussite. Cette publication présente le système Helix d’analyse de la performance dans cet environnement complexe : une approche flexible, qui permet aux gestionnaires de réseaux comme aux chercheurs de mesurer les six dimensions du succès des réseaux d’agents de manière à pouvoir comparer équitablement des services similaires.
Abul passe d’un pousse-pousse à l’ancienne à un pousse-pousse électrique
Stuart Rutherford, juin 2019
Dans le cadre du projet des carnets financiers quotidiens de Hrishipara, nous avons interviewé Abul Hossain tous les jours depuis juillet 2017 pour enregistrer les entrées et sorties d’argent de son ménage composé de quatre personnes.
Lorsque nous l’avons rencontré, il venait de se convertir de l’hindouisme à l’islam. Sa jeune épouse Shahnaz avait loyalement fait la même chose, malgré la rupture que cela avait provoqué avec sa propre famille. Ils élèvent leur fils de six ans et leur fille de deux ans dans leur nouvelle religion et espèrent que leurs enfants resteront à l’école beaucoup plus longtemps que le niveau de 4ème que le couple a atteint.
Âgé de 34 ans, Abul connaît les bases de la maçonnerie et travaille de temps en temps sur des chantiers, mais son principal métier est la conduite d’un pousse-pousse. Il est passé d’un pousse-pousse à l’ancienne à un pousse-pousse électrique, récemment remplacé par le modèle plus moderne illustré en photo. Shahnaz fait de la couture et s’occupe des animaux, mais elle consacre la plus grande partie de son temps à ses activités de mère de famille. Ils sont tous en bonne santé et Abul est un jeune homme dynamique, ambitieux et plein de ressources.
Dans cet article, nous examinons comment Abul est arrivé à réaliser son ambition d’un véhicule plus moderne et les conséquences de cette décision sur les finances et le niveau de vie de son foyer.
Vue d’ensemble Nos notes montrent que sur la période de 22 mois allant du 1er août 2017 au 31 mai 2019, les entrées d’argent du ménage se sont élevées à 29 478 $ et les sorties à 29 231 $, ce qui correspond à des flux mensuels moyens d’environ 1 300 $ dans chaque sens. Le ménage n’utilise pas l’argent mobile, ni les chèques, ni aucun autre instrument, ce qui veut dire que tous ces flux sont en espèces. Les montants sont exprimés en dollars internationaux après conversion des sommes en taka bangladais au taux de change calculé par la Banque mondiale pour refléter le fait que le pouvoir d’achat d’un dollar est beaucoup plus élevé au Bangladesh qu’aux États-Unis. Si nous avions utilisé le taux de change du marché, les rentrées d’argent d’Abul apparaitraient beaucoup moins importantes à environ 12 000 $ au total.
Budget ordinaire du ménage Notre premier schéma montre la répartition de leurs flux financiers entre ce que nous appelons les dépenses « ordinaires» du ménage et les revenus « ordinaires » tirés de leur activité professionnelle.
Les 15 018 $ de revenus ordinaires ne représentent que 51 % des entrées d’argent totales et les 11 552 $ de dépenses seulement 40 % des sorties d’argent totales, ce qui laisse beaucoup de transactions à expliquer. Les revenus ordinaires sont supérieurs aux dépenses ordinaires, ce qui laisse à penser qu’il existe une marge dans leur budget « ordinaire » pour d’autres dépenses en dehors des besoins « ordinaires ».
Dans la tableau 1, nous présentons la décomposition des revenus et dépenses ordinaires du ménage. Les 15 018 $ de revenus ordinaires ne représentent que 51 % des entrées d’argent totales et les 11 552 $ de dépenses seulement 40 % des sorties d’argent totales, ce qui laisse beaucoup de transactions à expliquer. Les revenus ordinaires sont supérieurs aux dépenses ordinaires, ce qui laisse à penser qu’il existe une marge dans leur budget « ordinaire » pour d’autres dépenses en dehors des besoins « ordinaires ».
Comme c’est le cas pour tous les participants à nos « carnets quotidiens », l’alimentation représente plus de la moitié des dépenses totales. La famille a dépensé plus de 2 000 $ uniquement en riz, environ 800 $ en poisson et autant en légumes et près de 300 $ en huile de cuisson. 220 $ ont été dépensés en volaille, mais seulement 51 $ en bœuf et en mouton.
Les loisirs apparaissent à peine dans leur budget. Le thé et le bétel sont consommés par Abul : quasiment tous les travailleurs manuels de notre échantillon mâchent du bétel une ou deux fois par jour. Une partie de l’argent de poche est passé en bonbons. Il a utilisé un peu de crédit téléphonique pour regarder des programmes religieux sur son smartphone. Mais il n’y a pas de cinéma, de sorties au restaurant ou de vacances, et ils ne possèdent pas de téléviseur. Aucun des deux n’a voyagé au-delà de la périphérie de la ville avoisinante.
Éléments exceptionnels Abul et Shahnaz ont eu d’autres sources de revenus et de dépenses en dehors de leur budget « ordinaire », comme illustré dans la figure 2.
Les revenus exceptionnels se sont élevés à 7 352 $ et proviennent principalement de cadeaux et de la vente de biens. En décembre 2017 et en juin 2018, Abul a vendu des vaches pour respectivement 720 $ et 1 294 $, et en décembre 2018, il a vendu un pousse-pousse pour 2 088 $. À huit reprises, il a reçu de l’argent donné par des voisins charitables, pour un total de 932 $, et il a également reçu deux gros paiements rétroactifs pour du travail effectué sur des chantiers, pour un total de 705 $. Pendant une courte période fin 2018, il a possédé deux pousse-pousse et en louait un à la journée, ce qui lui a rapporté 271 $.
Les dépenses exceptionnelles s’élèvent à 5 430 $ et sont elles aussi dominées par un petit nombre de transactions de montant élevé : 3 324 $ ont servi à l’achat d’un nouveau pousse-pousse en juin 2018, tandis que d’autres sommes significatives ont servi à acheter une batterie de pousse-pousse et une panoplie d’outils de maçonnerie.
Le point d’équilibre Nous pouvons maintenant compléter les espaces vides de notre schéma, qui correspondent à leurs opérations financières.
Abul admire l’autosuffisance ainsi que la tradition d’entraide communautaire qui est l’un des aspects qui l’ont attiré vers l’islam. Dans une interview antérieure, il nous avait indiqué qu’il éviterait de percevoir ou de payer des intérêts et s’appuierait sur la tradition des prêts en espèces sans intérêt appelés howlats (qui sont courants au Bangladesh dans toutes les communautés religieuses). Dans la pratique, son budget s’est avéré trop serré pour lui permettre d’accorder des howlats (bien qu’il fasse des cadeaux à des personnes et organisations religieuses), mais nous l’avons vu souscrire et rembourser sept howlats, le plus important d’entre eux s’élevant à 206 $.
Il n’a pas pu toutefois obtenir un howlat suffisamment important pour financer le remplacement de la batterie morte de son pousse-pousse, et il lui a fallu pour cela emprunter avec des intérêts. Il a emprunté 1 662 $ à un ami en s’engageant à rembourser 10,30 $ par jour jusqu’à avoir remboursé 2 250 $ au total. Il a respecté son engagement mais a rapidement cherché une alternative moins coûteuse. Quatre mois plus tard, il a remboursé le prêt au moyen d’un prêt moins cher accordé par un voisin compatissant et a poursuivi ses remboursements journaliers. Mais même cela s’est avéré difficile, et il a emprunté de nouveau, à hauteur de 294 $ cette fois-ci avec un taux de 10 % par mois.
Ces prêts ont consterné sa femme. Avant leur mariage, Shahnaz était cliente d’une banque de micro-finance (IMF), qu’elle a abandonnée sur l’insistance d’Abul lorsqu’elle s’est convertie à l’islam. Mais elle a depuis rapidement rejoint deux IMF (Grameen Bank et ASA) et convaincu son mari que les prêts des IMF étaient à la fois moins chers et plus faciles à gérer que les prêts informels. En l’espace d’un mois, elle a emprunté 588 $ auprès de chacune de ces IMF, remboursant 15 $ par semaine plus 3 $ d’épargne. Six mois plus tard, elle a rejoint une troisième IMF, la Fondation Dum, souscrivant de nouveau un premier prêt de 588 $.
À 54 $ par semaine, les remboursements et engagements d’épargne ont commencé à absorber une partie significative de leurs revenus, mais ce n’était pas fini : en avril de cette année, ASA a accepté de leur accorder un second prêt de 1 176 $. Abul nous explique : « je ne pouvais pas faire autrement : je n’arrive plus à rembourser mes howlats, mes prêts informels et les prêts des IMF avec mes revenus actuels ». Il espère que ce nouveau prêt lui permettra de rembourser suffisamment de dettes pour se remettre à flot. À ce stade, Il est difficile de dire s’il y parviendra. Le point positif est leur épargne auprès des IMF : ils ne s’en sont jamais servi et ont pu y ajouter quelques cadeaux, ce qui en porte le montant à un peu plus de 500 $ à fin mai.
Le temps et l’argent
Dans cette section et la suivante, nous examinons de plus près l’enchaînement de leurs opérations dans le temps, en commençant par une analyse des flux mensuels totaux (illustrée à la figure 4).
Cette figure montre que le mois de juin 2918 marque un tournant. Jusqu’à cette date, Abul était resté fidèle à sa volonté d’autosuffisance. À deux reprises (en septembre 2017 et janvier 2018), il a vendu son ancien pousse-pousse pour en acheter un nouveau plus moderne, grâce notamment à des paiements rétroactifs de chantiers de maçonnerie. Il s’est toutefois lassé des réparations permanentes qui lui coûtaient du temps et de l’argent, et en février 2018, il s’est remis à la maçonnerie. Le graphique montre toutefois que ses revenus ont alors chuté en dessous de ses dépenses ordinaires. En juin 2018, ses revenus étaient au plus bas. C’est là qu’il a pris sa grande décision : acheter un meilleur pousse-pousse (bien que toujours d’occasion) en vendant leur vache et en faisant des emprunts avec intérêts auprès d’un ami et de deux IMF.
L’impact sur leurs revenus ordinaires a été immédiat : le pousse-pousse électrique lui a permis de travailler plus longtemps chaque jour et les échéances de prêt l’ont amené à travailler de nuit comme maçon chaque fois qu’il en avait l’occasion. Depuis le mois de juillet, les revenus ordinaires ont dépassé les dépensent ordinaires, à l’exception du dernier mois. Mais le remboursement de la dette est récemment devenu le poste le plus important du budget familial. Au début, il n’avait pas vendu son ancien pousse-pousse et le louait à la journée, mais en décembre 2018, il a changé d’avis et l’a vendu, en partie pour se désendetter. Comme nous l’avons vu, il a aussi continué à emprunter auprès des IMF, pour des montants de plus en plus importants. Le remboursement des prêts s’effectue selon des échéances hebdomadaires de montant égal en plus des intérêts. Jusqu’à présent, ils ont réussi à respecter leurs échéances, mais il leur a fallu parfois recourir à des dons ou à des howlats à court terme pour y arriver.
La routine quotidienne À quoi ressemblent leurs transactions au quotidien ?
Dans les figures 5 et 6 ci-dessous, nous examinons deux mois différents, mai 2018 et mai 2019, en présentant les totaux journaliers pour chacune de nos six catégories de flux.
Nous avons volontairement conservé la même échelle verticale pour les deux figures, afin de mieux faire ressortir les changements spectaculaires intervenus dans la gestion de leurs finances.
En mai 2018, Abul avait un travail régulier, mais peu rémunérateur, et avait du mal à couvrir ses dépenses ordinaires. Un an plus tard, il a des revenus plus importants, mais également plus irréguliers, en tant que chauffeur de pousse-pousse et se retrouve endetté auprès de trois IMF et de prêteurs privés.
Abul est-il trop pauvre pour s’en sortir ?
Sur la base de ces calculs, ils consomment un peu plus de 4 $ par jour, ce qui représente à peu près deux fois la limite supérieure de l’extrême pauvreté telle que définie par la Banque mondiale et les place à proximité de la « imite supérieure de pauvreté » utilisée par le gouvernement du Bangladesh pour mesurer la pauvreté dans le pays.
Sur la base des normes internationales, la famille de 4 personnes d’Abul est pauvre, mais dans l’extrême pauvreté. Pour arriver à cette conclusion, nous avons analysé les opérations des 22 mois pendant lesquels nous les avons suivis pour calculer la consommation par jour et par personne du foyer. La consommation n’est pas la même chose que les « dépenses ordinaires », car ces dernières comprennent des éléments comme les réparations ou les chargements de batterie, qui sont des dépenses professionnelles permettant de générer leurs revenus : la consommation n’inclut pas ces dépenses.
En bref, Abul et sa famille sont à deux doigts de sortir de la définition officielle de la « pauvreté », mais sont confrontés au défi d’arriver à gérer une dette considérable. Nous avons l’intention de rester en contact avec eux suffisamment longtemps pour voir comment ils s’en sortiront.
Le travail de terrain réalisé pour le projet des carnets financiers quotidiens de Hrishipara est désormais intégralement financé par L-IFT, que nous remercions pour son soutien.
4 Idées pour transformer l’assurance agricole en Afrique de l’Ouest
Elizabeth Berthe, octobre 2019
Plus d’un demi-milliard d’Africains dépendent de leurs petites exploitations pour leur subsistance et leurs revenus. En moyenne, l’agriculture représente 35 % du PIB en Afrique de l’Ouest et emploie 60 % de la population active. Le secteur de l’assurance agricole en Afrique est également inégalement réparti, le développement du secteur en Afrique de l’Ouest étant limité à petit nombre de pays comme le Nigéria, le Bénin, le Sénégal, le Burkina Faso, le Mali et le Ghana.
Le secteur agricole continue d’évoluer dans un contexte de risques climatiques croissant avec un niveau très faible de maîtrise de l’eau, un accès aux financements difficile et un problème foncier récurrent qui constitue à son tour un obstacle au financement et à l’investissement. Les effets du changement climatique représentent un énorme défi pour les agriculteurs et pour la sécurité alimentaire en Afrique. Si le changement climatique ne peut pas être totalement contrôlé, nous pouvons atténuer les risques en favorisant des mécanismes de gestion des risques agricoles par le biais de l’assurance.
Pour les petits exploitants agricoles, l’assurance agricole compense les risques associés aux fluctuations météorologiques. Cette réduction des risques rend plus probable le fait qu’un agriculteur soit éligible au crédit et investisse ainsi dans des outils et des ressources (semences, engrais, main-d’œuvre) nécessaires avant la récolte, qui pourraient augmenter les rendements de ses cultures. Mondialement, le niveau d’assurance agricole est bas, mais il existe des approches qui intègrent le regroupement de plusieurs services (conseil, infos météo, infos sur les intrants..) ajoutant de la valeur et favorisant son adoption et son renouvellement. Aujourd’hui dans le parcours client, il y a des opportunités pour transformer l’assurance agricole, mais il faut continuer d’innover et intégrer la dimension des partenariats.
Concevoir des produits répondant aux besoins réels des clients
Du point de vue des produits, les petits exploitants agricoles n’ont pas actuellement le niveau de couverture des risques ou d’adaptation des caractéristiques des produits nécessaires pour une proposition de valeur sûre. L’intégration de l’opinion des petits producteurs en amont du programme peut grandement augmenter leur participation. Dans le cas le plus fructueux des initiatives d’assurance agricole, l’assurance a été conçue pour ouvrir des débouchés particuliers aux agriculteurs qui étaient auparavant limités par des risques particuliers. Dans certains cas, l’assurance a été regroupée avec le crédit pour les intrants agricoles, ou regroupée dans le prix de vente des intrants tels que les semences ou les engrais. Ce type de regroupement formel a le potentiel d’améliorer l’utilisation des produits d’assurance et d’investir dans des intrants de qualité, en particulier dans les environnements où les agriculteurs n’ont pas de garanties pour obtenir des prêts. Souvent, les approches de regroupement ne sont pas suffisamment adaptées pour surmonter la sensibilisation, la compréhension et l’acceptation limitées de l’assurance agricole par les petits exploitants.
Cependant, il faut comprendre les besoins, les attitudes et les croyances des petits exploitants pour adapter les produits aux spécificités de ce marché. Il est nécessaire de faire un gros travail marketing et adapter les périodes d’indemnisation pour les rendre plus souples et plus courtes. Au Sénégal par exemple, 92% des producteurs paient leur prime directement ou par intégration d’un crédit qui couvre uniquement le montant du capital restant dû à l’institution financière. Cela ne tient pas compte des autres dettes engagées par les producteurs ni des dépenses nécessaires pour faire face aux besoins primaires et au démarrage d’une activité de contre-saison ou d’une nouvelle campagne. De ce fait les indemnisations versées par la compagnie d’assurance sont reçues directement par l’institution financière qui rembourse le crédit en cours. Ce système ne permet pas aux producteurs de comprendre comment marche le produit car le plus souvent il ne perçoit rien de l’indemnisation payée. De plus, le calendrier cultural n’est souvent pas respecté par les institutions financières qui ne débloquent les crédits et donc l’assurance agricole que tardivement.
Une des premières pistes identifiées est de faciliter les paiements dans les deux sens (souscription et indemnisation) pour que ce soit facile, accessible, opportun et adapté aux comportements des petits producteurs. Aujourd’hui le paiement des indemnisations est fait par chèque, ce qui n’est pas du tout adapté aux besoins des petits producteurs. La mise en place d’une plate-forme de paiement digitale et/ou de partenariat avec les opérateurs de téléphonie mobile, pourrait grandement faciliter le paiement des primes (via crédit airtime ou prélèvement automatique sur le portefeuille électronique) et la réception des indemnisations par le producteur.
Vente et Distribution
La mise à l’échelle dépend de la participation bien informée de tous les groupes. Il est particulièrement crucial pour les clients des agriculteurs et pour les fournisseurs de services locaux de comprendre ce que l’assurance indexée couvre et ce qu’elle ne couvre pas, ainsi que les répercussions du risque de base. Ceci nécessite un grand investissement dans la capacité d’intervenants locaux :
Structurer les chaînes de valeur agricoles de manière responsable pour que les entreprises d’agro-business, agro-alimentaire, import-export qui achètent la production assurent le rendement des petits producteurs. Ces derniers ont une capacité de négociation importante avec les compagnies d’assurance vu le volume de leur chiffre d’affaire et ont tout à gagner à fidéliser leurs fournisseurs de matière première, et à assurer un niveau de production constant.
Harmoniser les produits d’assurance avec les services de soutien aux petits exploitants afin de réduire les risques et d’augmenter la probabilité d’une participation à l’assurance.
Nouer des partenariats avec des acteurs comme les Agri-techs qui offrent des solutions couvrant tous les maillons de la chaîne de valeur agricole en utilisant les progrès technologiques au service d’une agriculture durable et rentable, en mettant en place des systèmes de géolocalisation, surveillance et analyse plus performants et moins coûteux.
Faciliter la souscription en mettant en place des réseaux d’agents communautaires qui ont la confiance des associations, coopératives, petits producteurs et qui peuvent à la fois les sensibiliser sur les bonnes pratiques culturales, le fonctionnement de l’assurance agricole, les services financiers disponibles, l’accès au marché. La mise en place d’une plate-forme de paiement digitale et/ou de partenariat avec les opérateurs de téléphonie mobile pourra également permettre d’enregistrer les souscriptions à distance avec un système d’identification sécurisé.
Subventions dans la phase de lancement
Les pays développés indiquent fortement que les gouvernements sont les acteurs les plus importants dans la formation d’un marché national de l’assurance agricole.
Selon les recherches de l’ISF Advisors, les seules solutions ayant une échelle significative dans les pays à revenu faible et intermédiaire, y compris la Chine (160 millions d’assurés), l’Inde (40 millions assurés) et le programme IBLI du Kenya (20 000 euros assurés) — ont des subventions de primes de plus de 50 %.
Pour que le secteur atteigne une échelle, il faut combiner une approche globale de la stratégie, des politiques, de la réglementation et du développement de l’infrastructure de soutien avec des subventions gouvernementales pour que l’assurance agricole soit viable et abordable, en particulier dans la phase de lancement. Les subventions peuvent également contribuer à accroître la demande. L’Etat sénégalais cherche à améliorer les performances des filières agricoles et les revenus des producteurs en subventionnant entre autres l’assurance agricole à hauteur de 50%. La croissance de l’assurance agricole a été fulgurante ces trois dernières années. La CNAAS en tant que chef de file détient un portefeuille d’assuré qui est passé de 40 000 producteurs en 2016 à 193 000 producteurs en 2018 soit une croissance de 127% en moyenne par an et cela du essentiellement à l’assurance indicielle qui représente aujourd’hui 88% des assurances agricoles souscrites.
Un soutien financier est nécessaire principalement sous forme de subventions aux primes, mais il peut aussi inclure la réassurance, ou assister la mise en place de l’infrastructure (stations météorologiques, satellites, traitement des données et expertise en analyse) permettant la disponibilité des données essentielles au fonctionnement des régimes d’assurance indiciels. Avec une proposition de valeur claire et une collecte de données progressive, plus de cultures pourront être couvertes afin que le modèle puisse évoluer sans subventions.
Réclamations
En cas de sinistre, l’indemnisation est payée à la fin de la campagne alors que le besoin des petits producteurs serait de toucher les indemnisations juste après le sinistre. Dans le cas du Sénégal, les indemnisations sont payées entre le mois de Novembre et le mois de Février, soit entre 1 mois et 4 mois après la fin de la campagne, et ce particulièrement pour l’assurance indicielle basée sur les pluviomètres. Les données climatiques sont disponibles pour le faire mais les process actuels ne sont pas adaptés à une gestion souple des sinistres et indemnisations. En effet, les données relevées à partir des pluviomètres sont transmises à l’ANACIM qui peut seul certifier la validité de ces données et prend beaucoup de temps pour traiter et transmettre les informations.
Il est important de noter les efforts des différents acteurs (projets agricoles, institutions financières, broker, compagnie d’assurance, Etat) pour améliorer la condition des petits producteurs. Aujourd’hui environ 20% des producteurs sont couverts par une assurance agricole au Sénégal et cela montre déjà une avancée considérable même s’il reste encore beaucoup à faire. D’autres innovations sont nécessaires pour concevoir des produits indexés qui améliorent le bien-être des agriculteurs. L’innovation en matière de produits et de procédés repose sur un fort besoin d’innovation technologique afin de réduire la complexité et les coûts. Les marchés de l’assurance, bien qu’important, ne sont qu’une partie d’un ensemble d’outils de gestion des risques ; et il est important que les innovations soient conçues pour compléter et soutenir les filets de sécurité gérés par le gouvernement qui protègent les ménages les plus pauvres, les instruments financiers qui facilitent l’épargne et l’emprunt pour les ménages pauvres, et les réseaux informels d’assistance.
MSC est née il y a 20 ans au cœur de l’Afrique, dans le cadre du projet MicroSave en Ouganda. C’était en 1998. À l’époque, le secteur de la microfinance se concentrait quasi exclusivement sur le microcrédit, et comme son nom l’indique, MicroSave a vu le jour dans le souci de remédier à cette situation.
Au début, nous nous sommes inspirés de Stuart Rutherford, ainsi que d’approches élaborées dans les Philippines. Nous avons réalisé des études de marché pour mieux cerner les opportunités et les problèmes du point de vue des clients. Cela a constitué le point de départ de notre approche « axée sur le marché », qui caractérise notre activité de conseil et a permis de révéler les importants problèmes sous-jacents du modèle de microcrédit qui dominait le marché ougandais de l’époque –problèmes auxquels nous avons entrepris d’apporter des solutions.
Jusqu’en 2000, MSC s’est concentrée sur des études de marché tournées vers la demande en Afrique de l’Est et en Afrique australe. Nous avons formé des centaines de personnes dans le monde entier à notre approche « Market Research for MicroFinance » (MR4MF : études de marché pour la microfinance), un précurseur de ce qui est maintenant appelé la conception centrée sur l’humain. Après le premier bilan de mi-parcours, notre travail a évolué pour couvrir à la fois l’offre et la demande. Nous avons collaboré avec des leaders du secteur pour mettre au point des boîtes à outils et des contenus de formation sur 35 aspects différents de la gestion des IMF et des établissements bancaires.
Nous avons travaillé avec une vingtaine de prestataires de services financiers parmi les plus importants de l’Afrique de l’Est et de l’Afrique australe pour réorienter leur activité vers une approche davantage centrée sur le client ou « axée sur le marché ». Nous avons aidé Equity Building Society à passer de 109 000 clients au Kenya à une banque cotée en Bourse qui sert aujourd’hui 12 millions de clients dans toute l’Afrique de l’Est sous l’enseigne Equity Bank. Dans le cadre de nos interventions croissantes dans la finance digitale, nous avons également siégé au comité de pilotage d’Equity et participé aux premiers essais de M-Pesa.
En 2006, nous avons connu une nouvelle poussée de croissance lorsque nous avons transféré les enseignements et les réussites de notre expérience en Afrique vers l’Inde. Dans les deux années qui ont suivi, nous nous sommes développés au Sri Lanka, au Bangladesh, aux Philippines, en Indonésie et au Népal, ajoutant pays après pays à la liste de nos interventions. Nous avons élargi le champ d’application de nos connaissances et conseils de pointe à un éventail diversifié d’intervenants. Dans les années qui ont suivi, nous avons étendu notre activité à de nouveaux secteurs et services pour inclure, entre autres, les services financiers digitaux et le financement de l’énergie, le logement, l’eau et l’assainissement, tout en continuant de nous concentrer sur les catégories de population à faibles revenus.
À partir de 2013, MicroSave a commencé à intervenir dans le domaine de l’inclusion financière, du versement des prestations sociales (ou paiements « G2P », de l’anglais « government to person » : de l’État vers les personnes) et des conditions de l’inclusion sociale en Inde. Nous avons commencé par élaborer une méthodologie d’évaluation de l’état de préparation des districts pour la mise en place de paiements G2P, ce qui a permis aux pouvoirs publics de déterminer l’ordre de priorité de lancement des programmes G2P. Nous avons travaillé sur le programme de garantie de l’emploi rural (MGNREGA), les programmes d’assurance sociale et plusieurs programmes de subventions (GPL, produits alimentaires, kérosène, engrais).
Le travail que nous réalisons depuis des années bénéficie aujourd’hui à près de 850 millions de personnes, avec des flux de subventions qui s’élèvent à environ 71 milliards de dollars par an. Nous avons aussi travaillé sur le plus grand programme d’inclusion financière dans le monde : PMJDY, et contribué à l’harmonisation des procédures de vigilance à l’égard des clients (« KYC », de l’anglais know-your-customer) pour améliorer l’inclusion financière. Cela nous a permis de renforcer notre expertise en matière de conception de politiques publiques, d’identité digitale, de technologies digitales, d’essais pilotes de programmes sociaux et de KYC.
En 2016, nous avons transféré ces enseignements en Indonésie, participant à l’essai pilote d’un nouveau programme de subventions en espèces appelé Bantuan Pangan Non Tunai (BPNT). Nous travaillons aujourd’hui au développement de ce programme. Nous avons également participé à la réalisation d’un essai pilote visant à exploiter le système d’identité numérique « NIK » en Indonésie pour accélérer le rythme de l’inclusion financière grâce à la vérification en ligne de l’identité des personnes (e-KYC).
Aujourd’hui, nous nous enorgueillissons toujours de nos analyses pertinentes qui s’appuient sur une connaissance approfondie du contexte commercial et socio-culturel de nos marchés. Cependant, nous ne sommes plus la petite société d’études de marché de niche qui a fait ses premiers pas il y a bien longtemps dans un bureau partagé de l’Ouganda. Nous nous sommes développés pour devenir une organisation largement reconnue au sein de la communauté internationale du développement. Le nom MicroSave représente aujourd’hui un volume énorme de connaissances accumulées depuis deux décennies sur le mode de vie des personnes à faibles revenus. Le moment est venu de faire une pause pour réfléchir au chemin parcouru depuis 1998 et à la manière de passer à l’étape supérieure, car il reste encore beaucoup de travail à faire.
Le monde du développement dans lequel nous exerçons notre activité est en perpétuelle évolution. MicroSave a besoin de mieux se préparer à cet environnement qui ne cesse de se transformer. Nos horizons se sont élargis et le moment est venu de viser plus haut. Il nous faut pour cela une marque plus forte et plus cohérente, surtout au moment où notre équipe s’élargit pour couvrir de multiples territoires. Le moment est venu de renouveler notre identité.
Cette nouvelle identité doit s’inscrire dans la lignée du nom MicroSave qui a fait ses preuves, tout en faisant ressortir l’expertise considérable que nous continuons d’accumuler dans le secteur du développement.
Voici donc la nouvelle appellation de MicroSave : MSC, pour « MicroSave Consulting ». Après avoir examiné plusieurs options, nous avons conclu que MSC était un choix naturel, qui suscitait un attachement profond de la part de nos collaborateurs. L’enseigne MSC reste fidèle à notre héritage tout en nous offrant un cadre plus large pour toucher une base de clientèle qui est en train de se diversifier. Nous préférons utiliser l’acronyme MSC au lieu de MicroSave Consulting, car il est plus facile à mémoriser.
Ce nouveau nom s’accompagne d’autres changements dans notre charte graphique, nos principes de design et nos lignes directrices de communication. Nos nouvelles couleurs reflètent notre garantie de qualité, notre souci des autres, notre créativité et notre volonté profonde de mener à bien notre mission.
Avec ces changements, MSC a pour ambition d’atteindre plusieurs jalons importants. Nous souhaitons consolider notre identité en tant que jeune société de conseil multisectorielle et multidirectionnelle. Nous souhaitons étendre notre approche « axée sur le marché » aux différents aspects de la vie des personnes à faibles revenus. Notre travail couvre désormais l’éducation, la santé, l’emploi, les changements climatiques, l’eau, l’assainissement, l’énergie, le genre, la jeunesse et les réfugiées, entre autres.
Cette nouvelle identité reflète notre émergence en tant que partenaire de conseil de pointe qui vous apporte passion, réflexion originale, expertise et un large éventail de points de vue issus de différentes cultures. Nous renforcerons ainsi notre identité en tant que « spécialiste local de l’inclusion financière dans le monde ». Nous espérons que vous continuerez à nous apporter votre soutien en tant que clients ou bienfaiteurs et vous invitons à vous joindre à nous pour écrire l’avenir de MSC !
MSC est une société de conseil spécialisée qui travaille avec les acteurs des écosystèmes de services financiers pour apporter des améliorations durables à leur performance et créer de la valeur à long terme. Nous avons été au cœur de la révolution de la finance digitale depuis que nous avons participé aux essais pilotes de M-PESA et conseillé Equity Bank en matière de stratégie, de produits, de réseaux d’agents et de paiements groupés. Nous travaillons aujourd’hui avec les pouvoirs publics et les principales banques, sociétés de télécommunications et prestataires de services de l’ensemble de l’Asie et de l’Afrique.
Chez MSC, nous offrons des services de conseil stratégique et opérationnel qui permettent à nos partenaires d’innover et de réussir sur un marché en pleine expansion. Nous vous aidons à mieux comprendre vos clients, leurs besoins, leurs perceptions, leurs aspirations et leur comportement pour vous aider à tirer le meilleur parti de l’opportunité digitale, à répondre au marché de masse et à assurer l’avenir de votre entreprise.
Le succès de M-PESA s’explique par de nombreux facteurs, notamment le fait que Safaricom détenait une position dominante sur le marché kenyan de la téléphonie mobile, qu’il s’agissait déjà d’une marque de confiance bien connue, que le régulateur a permis à un opérateur de réseau mobile au Kenya d’offrir des services financiers digitaux et que le Kenya avait déjà un niveau élevé d’alphabétisation et de couverture mobile.
Safaricom a innové en s’appuyant sur les mécanismes de gestion de banque à distance et a rapidement tissé des liens avec le secteur bancaire pour faciliter la gestion du fonds de caisse. En effet, on a déjà beaucoup écrit sur les conditions ayant permis le succès de Safaricom, et on pourrait en écrire davantage[1]. Cependant, l’un des facteurs de succès les moins reconnus a été l’essai pilote minutieux du produit M-PESA. Cela s’est déroulé sur une période de dix-huit mois avant le lancement commercial de M-PESA en 2007.
L’essai pilote dans le cadre de services financiers n’a pas la même signification pour tout le monde. Il est donc important de faire la différence entre un essai pilote d’un point de vue technique ou systémique et un essai pilote opérationnel. Un test des systèmes est utilisé pour s’assurer que tous les systèmes sont opérationnels et fonctionnent comme prévu. Un essai pilote interne limité fait appel à des membres du personnel pour tester la fonctionnalité du produit à un faible niveau d’utilisation. Dans le cadre d’un essai pilote opérationnel d’une durée limitée, le produit est testé auprès de clients réels, dans une zone géographique définie.
Contrairement à certaines perceptions, M-PESA n’était pas le premier produit de paiement mobile. Il existait déjà d’autres produits d’opérateurs aux Philippines et en Zambie depuis des années et qui, à l’époque, étaient considérés comme ayant réussi. Safaricom aurait pu simplement copier Celpay en Zambie, ou Smart ou G-Cash aux Philippines. Il ne l’a pas fait. Au lieu de cela, il a choisi de développer un produit opérant au sein d’une institution de microfinance, Faulu Kenya. L’intention était de permettre à l’institution de microfinance d’accepter des remboursements de prêts par le biais de paiements mobiles. L’essai pilote a eu lieu à Mathare, un bidonville de Nairobi, et à Thika, une ville située à 50 km au nord de la capitale.
Lors de l’élaboration de ses systèmes, Safaricom a effectué des tests internes auprès du personnel pour vérifier les systèmes et la technologie, puis des tests avec un petit nombre d’opérateurs du marché à Nairobi pour tester l’interface et les modèles d’utilisation. Cependant, un essai pilote plus long a été mis en place pour étudier soigneusement les problèmes opérationnels, telles que l’adoption – ce produit pourrait-il être utilisé par les personnes ayant un niveau d’éducation et d’alphabétisation relativement faible – comme c’était plus souvent le cas à Mathare ? Dans le cadre de l’essai pilote, Safaricom a fourni des modèles de telephones simples à des groupes sélectionnés de clients de Faulu Kenya. Les équipes de Faulu Kenya, de Safaricom et de MicroSave (aujourd’hui MSC) ont enseigné aux membres du groupe comment utiliser M-PESA et, dans de nombreux cas, comment utiliser leurs nouveaux téléphones. Le travail était lent mais important. L’essai pilote a révélé l’importance des éléments suivants :
Lasimplicité : les utilisateurs avaient besoin de menus très simples sur leur téléphone. Les menus ont été simplifiés et testés à nouveau.
Le materiel de communication : l’utilisation du produit a été expliquée aux clients de Faulu à l’aide d’images simplifiées.
Le modèle du telephone : le produit devait marcher avec les modèles de telephones disponibles les plus simples pour pouvoir atteindre le marché de masse.
Le test s’est poursuivi. L’équipe de Safaricom s’est ensuite tourné vers des agents de développement par l’intermédiaire desquels les clients de Mathare ou de Thika pouvaient ajouter de la valeur à leur produit. Un nombre limité d’agents ont été sélectionnés. On a constaté que les agents étaient très importants pour expliquer le produit aux clients, mais qu’ils avaient aussi besoin d’aide. Une ligne d’assistance téléphonique a été créée, et une liste de questions fréquemment posées a été élaborée et testée, ce qui a permis de tirer les leçons suivantes :
Soutien aux agents
Les agents ont besoin d’une formation et d’un soutien attentifs pour être efficaces. Il faut les encourager à faire partie du mécanisme de communication avec les utilisateurs actuels et potentiels.
Safaricom a soigneusement étudié les données de l’essai pilote. Des transactions inhabituelles ont été observées et l’équipe d’essai pilote a ensuite effectué un suivi auprès de chaque client afin de comprendre la motivation des transactions. On a vite constaté que certains clients venant de Thika à Nairobi utilisaient M-PESA pour garder leur argent en sécurité ; d’autres clients transféraient de la valeur entre eux, parfois pour faciliter le remboursement de prêts ou pour régler des dettes personnelles. MSC a organisé des groupes de discussion et ce que l’on appellerait désormais des séances de conception centrées sur l’être humain pour comprendre les « cas d’utilisation » que les clients des essais pilotes avaient trouvés.
Valeur pour le client
On ne pouvait pas présumer la valeur de M-PESA pour les clients de Safaricom. Toutefois, il a pu être observé et, une fois observé, il a pu être communiqué aux clients.
Pour Faulu Kenya, l’essai pilote M-PESA était également très important. Il a démontré qu’il ne serait pas facile d’utiliser le mobile money pour rembourser des prêts. Faulu Kenya disposait d’un système manuel de tenue des registres, qui fonctionnait pour eux depuis de nombreuses années. Cependant, contrairement aux attentes, M-PESA n’a pas réduit le niveau de tenue des dossiers requis ; il a augmenté la charge de travail du président, du trésorier et du secrétaire du groupe, pour de multiples raisons.
Premièrement, tous les clients ne rembourseraient pas leurs prêts par l’intermédiaire de M-PESA, d’où la nécessité de tenir deux séries de registres comptables et de faire le rapprochement. Deuxièmement, au cours de l’essai pilote, les clients ont repris leurs pratiques habituelles consistant à rembourser leurs prêts par l’intermédiaire de tierces personnes – en l’occurrence, des lignes M-PESA d’autres membres du groupe, créant ainsi un besoin d’écritures supplémentaires au back office. Troisièmement, en cas d’erreurs commises par des membres du groupe lors du transfert, il fallait créer un compte d’attente pour enregistrer des opérations comptables et le solder par la suite.
Formation des clients
Pour effectuer des remboursements par le biais du mobile money, il a fallu élaborer des formations pour les clients, et aussi réexaminer et concevoir de nouvelles procédures pour appuyer le remboursement des prêts.
Au fur et à mesure de l’avancement de l’essai pilot et une fois les difficultés rencontrées par Faulu Kenya constatées, Safaricom s’est rendu compte que l’analyse de rentabilisation des agents serait difficile à soutenir par le seul remboursement des prêts, mais que dans le contexte kenyan, les transferts de fonds entre personnes étaient très intéressants. C’était particulièrement le cas des familles séparées où les enfants vivaient et travaillaient en milieu urbain tandis que les parents vivaient en milieu rural. C’est ainsi qu’est né le message de lancement de Safaricom : « Envoyez de l’argent à la maison ».
Proposition de valeur pour le client
Une proposition de valeur pour la clientèle de base doit être élaborée et expliquée en des termes adaptés à ce segment de marché.
Au fur et à mesure que l’essai pilote se poursuivait, Safaricom a découvert que les agents étaient confrontés à un certain nombre de problèmes, dont le besoin de détenir suffisamment de fonds de caisse pour que les transactions puissent avoir lieu et le besoin de formations continues. L’équipe M-PESA a donc commencé à mettre au point des mécanismes de suivi des agents, y compris des mécanismes empiriques pour évaluer la liquidité requise en fonction des volumes de transactions dans l’endroit concerné. Ils ont appris que les agents pouvaient régler le problème de fonds de caisse en s’envoyant de l’argent l’un à l’autre, et ont donc exigé que les agents présentent une demande collective.
Suivi des agents
Il est extrêmement important d’apporter un suivi aux agents et d’élaborer des mécanismes pour les aider à gérer leur fonds de caisse.
Comme on peut le constater à la lumière des leçons apprises, l’essai pilote a été vital pour Safaricom à de nombreux égards. Cela lui a permis de développer sa proposition de valeur client et de communiquer cette proposition aux clients potentiels dans un langage clair, concis et accessible.
Il a révélé l’importance des agents dans les communications avec les clients, tout en permettant à Safaricom de développer et de tester les mécanismes de soutien nécessaires au déploiement du produit. Il a mis en évidence les difficultés liées à l’utilisation de la boîte à outils SIM – telles que l’impossibilité de sélectionner le bénéficiaire dans les carnets d’adresses des téléphones des clients, ce qui a conduit à un réaménagement.
Cependant, la valeur et l’importance des tests opérationnels et de l’apprentissage actif des leçons décrites n’ont malheureusement pas été pleinement et immédiatement reconnues par ceux qui cherchent à rééditer le succès de M-PESA.
C’est ce qui ressort clairement des déploiements ultérieurs de M-PESA dans d’autres pays desservis par Vodafone, tels que l’Afghanistan où la proposition de valeur pour le client, laquelle avait connu du succès, portait sur le paiement des salaires à distance. La tentation pour Vodafone, et pour bien d’autres par la suite, était de penser qu’une fois « la solution » découverte au Kenya, elle pourrait être reproduite dans son intégralité et presque universellement sur tous les marchés. Il s’est avéré que ce n’est pas le cas. Cette incapacité à faire la différence entre les principes du mobile money et les pratiques propres au marché continue de limiter son succès.
En outre, si les caractéristiques extérieures des produits peuvent être et sont facilement répliquées, les mécanismes de gestion qui sous-tendent le succès des opérations de mobile money ne s’apprennent que progressivement. Le projet « Accélérateur de réseaux d’agents » (Agent Network Accelerator – ANA) de l’Institut Helix est conçu pour améliorer l’apprentissage et la documentation de ces mécanismes. Les essais pilotes demeurent aussi pertinents pour le lancement de services financiers digitaux aujourd’hui qu’ils l’ont été pour Safaricom lors du lancement de M-PESA.
Depuis le lancement de M-Shwari en 2012, l’environnement de l’offre de crédit digital s’est considérablement élargi, avec une demande grandissante de la part des PME et des consommateurs de petits prêts. Cependant il reste de nombreux défis auxquels les prestataires devront répondre s’ils veulent faire du crédit digital une réussite, dont la nécessité de créer des produits adaptés et de comprendre les consequences potentielles de leur utilisation. Cette présentation a été délivrée par Graham Wright, directeur général de MSC, lors d’un webinaire organisé par l’Observatoire des services financiers digitaux (DFS Observatory) en novembre 2017 à l’Université de Colombia. Dans sa présentation, il s’appuie sur l’expérience du Kenya, de l’Ouganda et de l’Inde.
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